Samuel Méric, installé au sud de Toulouse, voue une passion à la culture celtique

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  • Les carnyx fabriqués par Samuel Méric, sur le modèle de celui de Tintignac,  se vendent en France et dans le monde entier.
    Les carnyx fabriqués par Samuel Méric, sur le modèle de celui de Tintignac, se vendent en France et dans le monde entier. Reproduction L’Aveyronnais
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A Auribail, Emmanuel Pons

Artisan, musicien, occitaniste… Samuel Méric, installé au sud de Toulouse, a plusieurs talents qu’il a su marier dans sa vie professionnelle et artistique. Lui qui est l’un des très rares fabricants de carnyx au monde, instruments dont il joue au sein du groupe Gofannon.

Ne parlez pas à Samuel Méric de culture gauloise. "La Gaule, c’est pratique pour parler du peuple qui vivait sur ce territoire. Mais c’est surtout une invention de Jules César. L’image du blond, c’est plutôt celte." Une image popularisée par Uderzo et Goscinny, dessinateur et scénariste des aventures d’Astérix et Obélix, qui eux, situaient le village gaulois en Armorique, donc plus proche de l’idée que l’on se fait des cultures celtiques. Et le "Village gaulois", c’est là que tout a commencé quand, enfant, il découvre, lors d’une sortie scolaire, l’archéosite installé sur la commune de Rieux-Volvestre, à une cinquantaine de kilomètres au sud de Toulouse.

Une passion née au Village gaulois

"J’étais au CP à l’école de Miremont et on est allés visiter le site qui n’était pas encore ouvert au public. C’était en 2000 ou 2001. J’en garde un souvenir très précis", raconte le jeune homme, né à Rodez en juillet 1996 et dont la maman, Noëlle Louisor, est originaire de Marcillac-Vallon.

Le carnyx est un instrument de musique celtique, en métal cuivreux, en forme de trompe.
Le carnyx est un instrument de musique celtique, en métal cuivreux, en forme de trompe. Reproduction L’Aveyronnais

"Ensuite, j’y suis retourné en famille. À chaque fois, c’est moi qui demandais à y aller."

Une passion qui ne le quitte pas, lui qui, très tôt, s’intéresse à l’histoire médiévale et découvre le monde de l’heroic fantasy à travers les jeux vidéo, la littérature – notamment Tolkien, auteur du Seigneur des Anneaux – et la musique Metal. Au point de se lancer dans le travail de la forge et de créer ses premiers couteaux et épées, en 2013, alors qu’il a 17 ans. Et d’offrir ses services, quelques années plus tard, au Village gaulois. "En 2019, j’ai postulé pour être forgeron. Mais le poste était pris. Alors ils m’ont proposé d’être dinandier. C’est de la chaudronnerie traditionnelle sur des tôles de métal cuivreux, le bronze, le laiton, le cuivre. On travaille à froid après avoir chauffé les pièces", explique Samuel Méric.

Il faut une centaine d'heures pour fabriquer un carnyx.
Il faut une centaine d'heures pour fabriquer un carnyx. Reproduction L’Aveyronnais

"Mon passage au Village gaulois m’a beaucoup appris sur cette période historique et m’a ouvert les yeux sur l’archéologie, notamment le paléolithique supérieur, le néolithique et l’âge de bronze, se souvient-il. Au début, je faisais beaucoup de coupelles et quand le site a fermé ses portes [à la fin de la saison], j’ai décidé de me renseigner sur le carnyx. J’ai fait un an de recherches, chez moi, avant de réaliser le premier prototype, fin 2020."

Spécialiste du carnyx

Le carnyx, un instrument de musique celtique, en métal et en forme de trompe, encore aujourd’hui assez méconnu.

D’après Le carnyx de Tintignac

"Nous sommes seulement trois ou quatre, en France, à fabriquer des carnyx, note Samuel Méric. Et Une dizaine dans le monde."

Sur son site internet Obrador – atelier en occitan – il présente ses créations et explique l’origine du carnyx de Tintignac, dont il s’est inspiré. "J’ai reconstitué ce carnyx d’après la publication archéologique de la découverte de Tintignac. Ma première préoccupation a été d’adapter cet instrument au monde du XXIe siècle. J’ai donc imaginé un système à vis pour changer d’embouchure et avoir plusieurs gammes de jeu, mais il est aussi possible d’avoir une seule embouchure droite comme le carnyx archéologique", écrit l’artisan – l’artiste – qui propose par ailleurs de participer à des performances scéniques. Lui qui est aussi musicien.

Sur ce même site – obradorshop.com – , plusieurs vidéos permettent d’ailleurs de découvrir cet instrument et d’écouter sa sonorité si caractéristique. "Mes carnyx sont pensés pour faire de la musique, insiste Samuel Méric. Ils sont accordés et démontables pour le transport. Et adaptés aux musiques actuelles."

"C’est un instrument particulier, explique le jeune créateur, avec une tessiture énorme. Il était utilisé sur les champs de bataille, selon les auteurs grecs et romains. Et aussi dans un contexte spirituel et religieux", dévoilent les trouvailles archéologiques. "Aujourd’hui, poursuit-il, il est encore joué par des musiciens. Il intéresse aussi les collectionneurs et les passionnés qui reconstituent des scènes historiques, ainsi que les druides. Sa fabrication demande une centaine d’heures de travail."

Dans son atelier à Auribail, à une cinquantaine de kilomètres au sud de Toulouse.
Dans son atelier à Auribail, à une cinquantaine de kilomètres au sud de Toulouse. Emmanuel Pons

Je me sers de ces imaginaires historiques du Moyen Âge pour créer des compositions. Et mes textes sont inspirés par la nature, la ruralité et la spiritualité.
À propos de Gofannon

Samuel Méric est lui-même musicien au sein de deux formations. Nedergöth qui propose du "trad punk joué avec des instruments traditionnels et folkloriques, d’inspiration slave, scandinave et irlandaise". Et Gofannon – du nom d’une divinité de la mythologie celtique galloise – inspiré par la musique médiévale traditionnelle européenne, avec des paroles en anglais, en français, en suédois et en occitan, dans lequel joue aussi sa compagne Miren Roux.

"L’occitan de chez moi"

L’occitan, qui est un peu la seconde langue du jeune artiste. "J’ai commencé à l’apprendre à la fac, en 2015. Mais avant ça, mes parents m’y avaient sensibilisé. Ma mère me racontait qu’à Marcillac, elle avait souvent entendu les gens parler occitan. Pareil pour mon père [Xavier Méric], originaire d’Ariège."

Et comme il ne fait pas les choses à moitié, Samuel Méric décide d’aller, quelque temps plus tard, "faire du collectage, d’enregistrer les personnes dont l’occitan est la langue maternelle." "Je voulais connaître l’occitan de chez moi, explique-t-il. À la fac, on étudie essentiellement le languedocien ou le gascon, qui sont normalisés. J’ai ainsi pu saisir les différences et comprendre les influences. Au sud de Toulouse, par exemple, on ne parle pas le même occitan qu’en Aveyron. J’ai beaucoup écouté pour m’approprier la langue." Plusieurs enquêtes dont une sera remise au Centre occitan des musiques et des danses traditionnelles (COMDT), à Toulouse.

Déjà cinq albums

Toulouse où il sera ensuite responsable du Centre culturel occitan, pendant une année et demie.Aujourd’hui, Samuel Méric partage son temps entre la fabrication de carnyx qu’il vend à travers le monde, et la musique.

En plus de son atelier, il a ainsi installé chez lui un studio où il a enregistré, mixé et produit les albums déjà parus. Deux pour Nedergöth, trois pour Gofannon, où on peut entendre le son du carnyx. Gofannon dont le prochain opus, Neolithic Witchcraft, est attendu courant 2024.

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