Royaume-Uni: duel très serré pour des législatives pleines d'incertitudes

  • Un renard passe devant la résidence du Premier ministre britannique, le 30 mars 2015, jour de la dissolution du Parlement et de l'ouverture de la campagne électorale pour les législatives du 7 mai
    Un renard passe devant la résidence du Premier ministre britannique, le 30 mars 2015, jour de la dissolution du Parlement et de l'ouverture de la campagne électorale pour les législatives du 7 mai AFP/Archives - Justin Tallis
  • A un mois du scrutin, conservateurs et travaillistes sont au coude à coude à 34% et 33% des intentions de vote, selon la moyenne des sondages calculée par la BBC.
    A un mois du scrutin, conservateurs et travaillistes sont au coude à coude à 34% et 33% des intentions de vote, selon la moyenne des sondages calculée par la BBC. AFP/Archives - Justin Tallis
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Centre Presse Aveyron

Dans un mois, les Britanniques sont conviés à des législatives ultra-serrées et porteuses de profonds bouleversements: avec la disparition du bipartisme qu'on croyait aussi enraciné que la Monarchie, le temps est venu des alliances, synonymes d'intenses marchandages et souvent d'instabilité.

Le scrutin du 7 mai réveille la menace de voir sortir de l'Union européenne un Royaume-Uni par ailleurs menacé d'implosion, soulignent les analystes qui retiennent dans l'immédiat deux certitudes:

- Ni les conservateurs ni les travaillistes en déclin après avoir longtemps dominé le paysage politique ne sont en mesure, selon les sondages, d'arracher la majorité absolue de 326 sièges sur 650 à la chambre des Communes.

- Le poste de Premier ministre se joue entre deux hommes: le sortant conservateur David Cameron, 48 ans candidat à un second quinquennat, et le chef de l'opposition travailliste Ed Miliband, 45 ans.

Au risque de s’affaiblir, Cameron ou Miliband devront échafauder des alliances plus ou moins problématiques avec une ou plusieurs formations secondaires. Les Libéraux-démocrates de Nick Clegg qui sortent de cinq ans de coalition malaisée avec les conservateurs, sont susceptibles de reconduire leur mariage de raison ou de signer une alliance politique avec le Labour.

Les séparatistes écossais du SNP, le Plaid Cymru gallois ou les verts envisagent aussi une association à gauche.

Commentant le casse-tête, Simon Hix, politologue à la London School of Economics (LSE), explique: "Nous sommes désormais de facto dans un système de multipartisme". Derrière lui, la carte électorale traditionnellement bicolore rouge (Labour) et bleu (Tory) emprunte les couleurs de l'arc-en-ciel.

Egalement expert à la LSE, Tony Travers assure que la montée des nationalistes accélérera l'évolution "vers un quasi-Etat fédéral" du Royaume-Uni, composé de l'Angleterre, de l'Ecosse, du Pays de Galles et de l'Irlande du nord.

Le vote du 7 mai introduira une autre formidable incertitude. En cas de victoire, David Cameron a promis, sous la pression des eurosceptiques, d'organiser un référendum sur le maintien (ou pas) du pays dans l'UE, d'ici 2017.

A plus long terme, un second référendum se profile avec ou sans attelage travailliste-SNP, déjà qualifié "d'alliance Frankenstein" par certains médias. "Le principal objectif (du SNP) n'est pas de contribuer à un gouvernement stable au Royaume-Uni, mais d'obtenir un autre référendum d'indépendance", après avoir raté de peu un premier rendez-vous historique en septembre dernier, explique Tony Travers.

- Accouchements difficiles -

Reste la perspective d'un jeu de massacre politique. David Cameron est sur un siège éjectable. "Il partira s'il est battu" et aura du mal à se maintenir s'il gagne de justesse, relève Hix. D'après lui Ed Miliband sera également poussé vers la sortie "s'il ne parvient pas à remporter l'élection après cinq ans d'austérité" conservatrice.

Le dilemme droite-gauche et la carrière politique de Nick Clegg, le chef des Lib-dem tourneront court s'il est "décapité" dans sa circonscription de Sheffield, souligne Tony Travers.

Mi amusé, mi sérieux, Hix note qu'un bookmaker prend des paris à 21 contre 1 sur le départ sous un mois des trois leaders traditionnels.

Dans le débat dominé par l'économie, la crise du système de santé, l'immigration et l'Europe, David Cameron veut "terminer le travail", en se prévalant d'une croissance record et d'un chômage sous la barre des 6%.

Ed Miliband souligne quant à lui les dégâts collatéraux de l'austérité: creusement des inégalités, chute des revenus des classes moyennes. 80% des Britanniques "ont le sentiment d'une crise du coût de la vie", remarque Gideon Skinner, directeur des recherches à l'institut Ipsos Mori.

A un mois du scrutin, conservateurs et travaillistes sont au coude à coude à 34% et 33% des intentions de vote, selon la moyenne des sondages calculée par la BBC.

Les autres partis, qui se rêvent en faiseurs de roi, se partagent le tiers restants avec notamment l'Ukip à 13%, les Lib-Dem à 8%, les verts à 5%.

Toutefois, le mode de scrutin uninominal à un tour, qui accorde la victoire au candidat arrivé en tête dans chaque circonscription quel que soit son score, introduit des distorsions considérables.

En passe de réaliser une razzia en Ecosse avec un score représentant 3,5 à 4% des suffrages à l'échelle nationale, le SNP escompte une quarantaine de députés. Avec 10 à 15% des suffrages, disséminés sur tout le territoire, l'Ukip populiste et europhobe de Nigel Farage qui a triomphé aux dernières européennes "pourrait terminer avec un seul élu", explique Jack Blumenau, expert es-sondages auprès du LSE.

Le dernier élément de suspense porte sur le calendrier. La formation du gouvernement est censée intervenir à la mi-mai. Du fait des tractations post-électorales, cette date pourrait se révéler aussi approximative que celle de l'accouchement -dans la deuxième quinzaine d'avril- du deuxième bébé royal de William et Kate, l'autre événement qui passionne le pays en ce début de printemps.

Source : AFP

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