Espionnage: le fondateur de WikiLeaks appelle Paris à réagir

  • Capture d'écran de Julian Assange lors d'une interview à TF1 depuis l'ambassade d'Equateur le 24 juin 2015 à Londres
    Capture d'écran de Julian Assange lors d'une interview à TF1 depuis l'ambassade d'Equateur le 24 juin 2015 à Londres TF1/AFP - -
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Centre Presse Aveyron

Le fondateur de WikiLeaks Julian Assange a pressé mercredi Paris de réagir après les révélations d'espionnage des Etats-Unis visant son allié français mais le président Barack Obama a joué l'apaisement avec son homologue François Hollande.

"La souveraineté (de la France) ne peut pas être piétinée", a lancé le fondateur du site lanceur d'alertes, sur la télévision TF1, estimant que "le moment est venu pour la France" de lancer une enquête parlementaire et des poursuites.

Auparavant, le président Hollande avait jugé "inadmissible" l'écoute de conversations de trois chefs d'Etat français par les services de renseignement américains.

Dans un entretien téléphonique avec le président français, le président Obama a réaffirmé "sans ambiguïté" son engagement à "en terminer avec des pratiques du passé (...) inacceptables entre alliés", selon la présidence française.

A Washington, le secrétaire d'Etat John Kerry a réaffirmé que les Etats-Unis "ne ciblaient pas, et ne cibleraient pas, des amis tels que le président Hollande", reprenant mot pour mot la ligne de défense de la Maison Blanche.

Le ministre américain, francophone et francophile, a qualifié "les Français" de "partenaires indispensables".

Fin 2013, le président Obama s'était engagé à ce qu'il n'y ait pas d'écoutes de présidents ou de chefs de gouvernement de pays amis ou alliés, après des révélations sur l'ampleur du système de surveillance américain.

Des documents transmis par l'ancien consultant de l'agence d'écoutes NSA Edward Snowden, aujourd'hui réfugié en Russie, avaient montré que même la chancelière allemande Angela Merkel avait été ciblée.

François Hollande et ses deux prédécesseurs Nicolas Sarkozy et Jacques Chirac ont été visés par ces écoutes, selon des documents de Wikileaks publiés mardi par deux médias français.

Et "les documents les plus importants restent à venir", a affirmé M. Assange depuis l'ambassade d'Equateur à Londres où il est réfugié depuis trois ans. "Nous avons d'autres informations qui vont sortir le moment venu. D'un point de vue politique, ce qui va sortir sera beaucoup plus important", a-t-il dit.

- L'ambassadrice américaine convoquée -

Réunion d'un Conseil de défense, convocation de l'ambassadrice américaine à Paris, envoi de deux responsables du renseignement aux Etats-Unis: M. Hollande a réagi avec vigueur mercredi. La présidence a prévenu que Paris "ne tolèrera aucun agissement mettant en cause sa sécurité".

Les documents publiés évoquent des échanges entre responsables français sans, sur le fond, trahir de secrets d'Etat.

Malgré tout, le gouvernement français s'est offusqué de ces pratiques.

Le Premier ministre Manuel Valls a demandé à Washington de "tout faire pour réparer les dégâts". Le chef de la diplomatie Laurent Fabius dénonçait des méthodes qui "portent atteinte à la confiance" entre alliés.

Dans l'opposition, Nicolas Sarkozy et Jacques Chirac ont fustigé aussi des méthodes "inacceptables" entre alliés, selon leur entourage.

La gauche radicale et l'extrême droite ont même réclamé l'arrêt des négociations sur le traité de libre échange UE-Etats-Unis. Sur ce point, le gouvernement a appelé à garder "la mesure".

- 'Posture' -

Au-delà des protestations, la France n'a pas de grande marge de manoeuvre.

"Il va y avoir des discussions sévères, peut-être des déplacements de membres du personnel politique américain en poste en France et puis voilà, cela n'ira pas plus loin", a prédit la spécialiste Nicole Bacharan.

Les intérêts des deux pays sont trop convergents sur nombre de crises, de l'Ukraine à la lutte contre le groupe Etat islamique (EI) en Irak en passant par le Sahel, pour que le scandale débouche sur une rupture.

D'après plusieurs observateurs, la réaction française est de l'ordre de la "posture". "On est obligé de dire que c'est pas bien, et en même temps on sait que ça continuera", commentait ainsi le député centriste Hervé Morin.

"En matière de renseignements, il n'y a pas d'amis, pas d'alliés, il n'y a que des intérêts", a pour sa part rappelé Alain Chouet, ancien responsable des services français, selon lequel la France "ne se prive pas" non plus d'espionner ses alliés.

Des associations de défense des droits de l'homme ont dénoncé l'inaction judiciaire de la France, alors que la surveillance de la NSA a fait l'objet d'une plainte dans ce pays dès 2013.

Mercredi justement le Parlement a adopté une loi controversée sur le renseignement qui légalise, selon ses détracteurs, des pratiques contestables des services secrets au nom de l'antiterrorisme. Une concomitance loin d'être fortuite: les médias français Libération et Mediapart qui ont publié les documents de Wikileaks sont opposés à cette réforme.

"On se met en position de tout analyser, et d'écouter n'importe qui, dans une société obsédée par le terrorisme. C'est le cas des Etats-Unis post-11 Septembre, ce sera le cas de la France post-7 Janvier", selon Libération, en allusion aux attentats à Paris.

Source : AFP

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