Les agriculteurs européens font entendre leur colère à Bruxelles

  • Des agriculteurs face à la police belge lors d'une manifestation devant la Commission économique européenne à Bruxelles, le 7 septembre 2015
    Des agriculteurs face à la police belge lors d'une manifestation devant la Commission économique européenne à Bruxelles, le 7 septembre 2015 AFP - EMMANUEL DUNAND
  • Un fermier met le feu à des pneus devant l'UE à Bruxelles lors de la manifestation le 7 septembre, 2015
    Un fermier met le feu à des pneus devant l'UE à Bruxelles lors de la manifestation le 7 septembre, 2015 AFP - JOHN THYS
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Centre Presse Aveyron

Ils ont lancé des pétards, klaxonné, incendié des pneus jusqu'à sous les fenêtres des institutions européennes. Des milliers d'agriculteurs ont crié lundi leur colère à Bruxelles et exhorté les dirigeants européens à trouver une issue à la crise.

Partis à l'aube de Belgique, de France et d'Allemagne, des colonnes de tracteurs sont arrivés dans la capitale belge dans la matinée, où ils ont causé de très importants embouteillages, en particulier dans le quartier Schuman, qui abrite le siège de la Commission et du Conseil européen.

La police, qui avait vivement déconseillé aux automobilistes de se rendre à Bruxelles, a comptabilisé 1.455 tracteurs et quelque 7.000 agriculteurs, producteurs de lait ou de viande principalement, réunis à l'appel des syndicats agricoles.

Objectif: se faire entendre des responsables de la Commission et des ministres de l'Agriculture des 28, réunis en conseil exceptionnel, à la demande de la France, sur la nouvelle crise que traverse le monde paysan depuis plusieurs mois.

"Je suis Eleveur", indiquait une pancarte portée par un jeune manifestant, en écho aux "Je suis Charlie" qui avaient fleuri après les attentats de Paris en janvier.

Rémy Hulin, un éleveur à la retraite, est venu du Calvados (ouest de la France) avec une potence suspendant un mannequin habillé d'une salopette d'agriculteur. "Il y a des centaines de suicidés dans l'élevage, c'est le résultat d'une politique agricole désastreuse", a-t-il expliqué à l'AFP.

"Tous les matins, on se lève et on perd de l'argent à traire nos vaches", a protesté Jacky, un autre agriculteur venu lui aussi du Calvados avec près de 100 membres de la Coordination rurale.

Sur le rond-point Schuman, épicentre de la manifestation, des cordons de policier en tenue anti-émeute, plantés derrière des barbelés, ont barré tout accès aux bâtiments européens pendant des heures, subissant des jets d'oeufs, de bouteilles en verre et d'autres projectiles.

Un vache en plastique bleu et frappée des étoiles jaunes du drapeau européen, grandeur nature, pendait corde au cou du haut d'un bulldozer.

- 'Nous on crève' -

Des manifestants ont même utilisé une louche en guise de catapulte pour bombarder d'oeufs les forces de l'ordre. Un policier, blessé à la jambe, a dû être emmené à l'hôpital, pendant qu'un second était soigné sur place, selon un porte-parole de la police cité par l'agence Belga.

Les policiers belges - exceptionnellement renforcés par des collègues néerlandais - ont fait usage de gaz lacrymogène pour empêcher des manifestants de forcer le barrage avec leurs tracteurs. Ils se sont également servi de canons à eau pour faire reculer les protestataires et éteindre des ballots de paille, des pneus et même une caravane incendiés par les agriculteurs.

Malgré ces incidents, le bourgmestre (maire) de Bruxelles, Yvan Mayeur, a estimé que la manifestation se déroulait jusqu'ici "globalement dans le calme".

En milieu d'après-midi, une partie des manifestants avait commencé à refluer vers leurs autocars, mais plusieurs centaines d'entre eux continuaient leur face-à-face tendu avec la police aux abords du rond-point Schuman, dans une atmosphère chargée de l'odeur âcre des brasiers.

Dans les rues avoisinantes, les engins agricoles occupaient toujours la chaussée en rangs de trois ou quatre, sur des centaines de mètres en direction du centre-ville. Ils devaient quitter Bruxelles dans la soirée.

"Le lait est payé moins cher qu'il nous coûte à produire, il nous faudrait un prix de base de 350 à 400 euros (la tonne) alors qu'on est payé 280 euros actuellement", a déploré le producteur laitier français.

"Quelle nourriture donnerez-vous à vos enfants ?" "Europe veux-tu encore de nous ?", pouvait-on lire sur des pancartes et bannières. "On vous nourrit, nous on crève". "Passant, souviens-toi de l'agriculture équitable et nourricière aujourd'hui décimée par la mondialisation", lisait-on sur d'autres.

L'effondrement des cours du lait et des viandes bovines et porcines a provoqué tout l'été une fronde des agriculteurs européens, du Royaume-Uni à l'Allemagne, en passant par la France.

Manfred Gilch, un producteur laitier bavarois, disait recevoir 29 centimes par litre de lait, pour un coût de production de 45 à 50 centimes le litre. Sa ferme, qui existe depuis plusieurs siècles, n'est plus rentable. "Il n'y a pas de perspective de transmettre la ferme", a-t-il témoigné.

Source : AFP

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