De New York à Paris, à 14 ans d'intervalle, un traumatisme comparable

  • Soldats déployés dans le cadre du plan Vigipirate devant la Tour Eiffel le 18 novembre 2015 à Paris
    Soldats déployés dans le cadre du plan Vigipirate devant la Tour Eiffel le 18 novembre 2015 à Paris AFP - JOEL SAGET
  • Des personnes enlacées le 20 novembre 2015 devant le Bataclan à Paris lors de l'hommage aux victimes
    Des personnes enlacées le 20 novembre 2015 devant le Bataclan à Paris lors de l'hommage aux victimes AFP - BERTRAND GUAY
  • Fleurs et bougies devant le café La Belle Equipe le 18 novembre 2015 rue de Charonne à Paris
    Fleurs et bougies devant le café La Belle Equipe le 18 novembre 2015 rue de Charonne à Paris AFP - BERTRAND GUAY
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Centre Presse Aveyron

A 14 ans d'intervalle, New York et Paris ont connu le même traumatisme terroriste, et montré la même résilience, déterminés à continuer à vivre, à aimer et à rire, en dépit des larmes et de la peur.

Et selon les experts, c'est la meilleure réponse à apporter à ce genre d'événement.

"La plupart des gens, y compris ceux directement impliqués vont se remettre", affirment des spécialistes ayant étudié les effets du 11-Septembre à New York.

Dans un premier temps, "la plupart des gens directement exposés vont montrer une détresse considérable", explique à l'AFP le professeur George Bonanno, qui dirige au Teachers College de l'université de Columbia à New York, le "Loss, Trauma and Emotion Lab" (laboratoire sur le deuil, le traumatisme et les émotions).

Pour lui, cette première réaction est absolument normale et saine. "Cela veut dire que votre système de réponse au stress fonctionne", explique M. Bonanno, co-auteur d'une étude sur les effets psychologiques du 11-Septembre 10 ans après.

Mal dormir, pleurer, être anxieux, ne pas avoir le moral, être hyper-sensible à certains bruits, à certains rappels du drame, en font partie. "Le stress est naturel", insiste-t-il, expliquant que c'est une phase transitionnelle nécessaire, qui permet ensuite d'aborder une deuxième étape, celle de relever le défi d'une nouvelle réalité.

"Cela ne veut pas dire que la personne est folle, ou qu'elle souffre de troubles ou de TSPT (troubles de stress post-traumatique), insiste aussi Douglas Mennin, psychologue et professeur au Hunter College.

Selon lui, le traumatisme s'estompe généralement en quelques semaines, quelques mois. Pour "un petit pourcentage de personnes, moins de 10%", les troubles sont plus graves et durent.

A New York, 2.700 personnes avaient été tuées dans l'effondrement des tours du World Trade Center provoqué par deux avions de ligne détournés et jetés contre les immenses gratte-ciel. Quelque 10.000 personnes ont été diagnostiquées comme souffrant de stress post-traumatique.

A Paris, ce sont 130 personnes qui ont été tuées, abattues à coup de pistolet mitrailleur parfois à bout portant, et plusieurs centaines ont été blessées.

Riverains des tours, personnel de secours, personnes ayant perdu un proche, ou ayant une bonne vue sur les gratte-ciel, même de loin, ont été les plus éprouvés.

"C'est chez eux que nous avons trouvé le plus de cas d'anxiété, de dépression" et TSPT, explique Anne Marie Albano, directrice d'un centre sur l'anxiété à l'université Columbia. Mais selon elle, en dehors de ceux directement affectés, et d'autres qui souffraient de ces troubles avant les attentats, "aucun nouveau cas de maladie psychiatrique comme le TSPT ou la dépression" n'a été détecté. "Et je pense que ce sera la même chose à Paris".

- Retourner dans les cafés -

Ces experts saluent la détermination des Parisiens, leurs rassemblements spontanés, leur volonté de continuer à vivre comme avant. Ils saluent aussi les autorités qui les ont tenus informés.

"Les gens ont besoin d'informations claires et ils ont besoin de croire ces informations", explique M. Bonanno.

Fleurs, bougies, photos, célébrations, rassemblements "peuvent beaucoup aider, dit Anne Marie Albano. "Les gens ont besoin les uns des autres", renchérit George Bonanno. Mme Albano évoque aussi toutes les initiatives d'entraide nées à New York après le 11-Septembre, y compris dans les écoles. "Les enfants, les adultes, doivent s'exprimer et faire quelque chose à leur niveau, pour se sentir partie de la solution et du processus de guérison".

Et il faut aussi, insistent ces experts, reprendre le fil de sa vie dès que possible. Reprendre le yoga, le sport, retourner au concert, dans les cafés. "Voir des amis qui redonnent un sens de sécurité", dit Douglas Mennin. Et limiter la surexposition médiatique.

Faut-il immédiatement voir un thérapeute ?

"Absolument pas", estiment-ils, sauf si la personne en a envie.

Aux Etats-Unis, après le 11-Septembre, on pensait qu'il fallait parler, revivre les événements le plus vite possible pour les évacuer. L'expérience a prouvé selon eux que c'était contre-productif et pouvait même être dangereux, générant des angoisses qui n'existaient pas.

L'être humain "est programmé pour être résilient", explique George Bonanno, tout en admettant que cela ne marche pas toujours.

A New York on continue chaque année à commémorer le 11-Septembre en lisant solennellement la liste des victimes.

Mais les New-Yorkais ont dépassé le traumatisme, estime Douglas Mennin. "Les tours jumelles faisaient partie de notre identité, de notre skyline. Mais nous l'avons dépassé, nous avons incorporé le 11-Septembre à notre histoire et les Parisiens à leur façon feront la même chose".

A New York, dit aussi Anne Marie Albano, "nous respectons ce jour particulier, cela nous rend vigilants, mais nous respectons aussi le fait de vivre et de ne pas céder au terrorisme".

Source : AFP

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