Réforme des retraites : la colère de la rue peut-elle se transformer en "zadisation" du pays ?

  • Un nouveau rassemblement tendu vendredi soir, place de la Concorde, à Paris.
    Un nouveau rassemblement tendu vendredi soir, place de la Concorde, à Paris. MaxPPP
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Centre Presse Aveyron

La colère monte en France après le passage en force de l’exécutif sur le texte acté par un 49.3. Le gouvernement craint désormais une “zadisation” du pays et envisage tous les scénarios politiques.

La mobilisation contre le gouvernement s'est poursuivie, vendredi 17 mares, après le tollé provoqué par le recours à l’article 49.3 de la Constitution pour faire adopter sans vote l’impopulaire réforme des retraites.
La décision provoque une vague de protestations qui s’est traduite par des manifestations spontanées depuis jeudi soir, partout en France. Parfois émaillées de violences et de scènes de chaos à Paris, Marseille, Lyon, Lille, Nantes, Rennes, ou encore Amiens et Grenoble.

310 interpellations ont déjà été réalisées à travers le pays, dont 258 à Paris, a annoncé vendredi matin le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin. Jérôme Rodrigues, figures emblématiques des “gilets jaunes”, fait partie des personnes arrêtées dans la capitale, selon le député LFI Alexis Corbière.

Le mouvement peut-il se radicaliser en agrégeant ainsi les colères, comme le fit cette France des ronds-points en 2018 et 2019 ? De nouvelles manifestations ont encore été improvisées vendredi dans plusieurs villes françaises (Rennes, Rouen, Évreux…), assorties de coups de force. À Paris, où plus de 10 000 tonnes de déchets non ramassés s’entassent désormais dans les rues, selon la mairie, le périphérique a été bloqué un temps, à l’appel de la CGT.

"On est là !"

Un rassemblement spontané a également pris forme pour la deuxième soirée consécutive place de la Concorde, avec plus de 3 000 personnes réunies, malgré la fermeture des stations de métros dans le quartier. "On est là !", ont scandé les manifestants face à un imposant dispositif de CRS équipés de casques et boucliers.

À Bordeaux, des manifestants se sont déployés sur les rails de la gare Saint-Jean, interrompant le trafic. Des étudiants et lycéens ont également fait entendre leur colère avec des occupations ou des blocages de sites universitaires (Nanterre, Paris 1, Mulhouse, Bordeaux, Lyon…). Le préfet de la région Bourgogne Franche-Comté, Franck Robine, a annoncé, lui, un dépôt de plainte "au nom de l’État", après que des mannequins à l’effigie d’Emmanuel Macron, Élisabeth Borne, Olivier Dussopt et Olivier Véran ont été brûlés jeudi à Dijon.

"Des mesures renforcées pour la protection des élus"

Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a demandé aux préfets des "mesures renforcées de protection des élus". Les ministres ont été priés, eux, d’annuler leurs déplacements sur le terrain jusqu’à nouvel ordre. Et ce, afin de "ne pas mobiliser les moyens locaux et ne pas surcharger les préfets", selon les services de la Première ministre, cité par France Télévisions. Les ministres de l’Intérieur, de la Transition écologique et de l’Agriculture ont donc renoncé à leur déplacement prévu vendredi à La Teste-de-Buch (Gironde), rapporte France Bleu.

Alors que le climat social se tend en France, l’intersyndicale a appelé à une nouvelle journée de grèves et de manifestations jeudi 23 mars et à des actions "de proximité" ce week-end. La CGT incite aussi à mener "des actions visibles" en début de semaine prochaine.

"On va laisser libre cours à la créativité des travailleurs sur les lieux de travail", a expliqué vendredi Olivier Mateu, secrétaire de l’Union départementale CGT des Bouches-du-Rhône, sur BFMTV.

Le SNES-FSU, la CGT et Force Ouvrière ont appelé les surveillants du baccalauréat à faire grève à partir de lundi, pendant les épreuves de spécialité.

La crainte d'une “zadisation” du pays

Les expéditions de carburant sont déjà à l’arrêt dans quatre raffineries et le site TotalEnergies de Normandie se joindra au blocage la semaine prochaine, alors que seules 2,5 % des stations-service sont en rupture de carburant pour l’heure. Dans le Loir-et-Cher, Chémery, le plus gros site de stockage de gaz d’Europe était également à l’arrêt vendredi.

Du côté des transports, alors que le trafic aérien s’annonce normal ce week-end, la Direction générale de l’aviation civile demande des annulations de vols lundi à Paris Orly (30 %) et Marseille (20 %). Et les syndicats de la SNCF appellent à poursuivre la grève reconductible. La situation s’améliorera ce week-end dans les gares, mais restera perturbée : quelque 4 TGV sur 5 et 3 TER sur 5 circuleront, en moyenne.

Alors que l’exécutif craint désormais une “zadisation” du pays et envisage tous les scénarios politiques, "éteindre le feu, ce n’est pas lié au changement de Premier ministre ou changer de gouvernement. C’est retirer la réforme", a prévenu vendredi le leader de la CFDT, Laurent Berger.

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