Climat : "L’Occitanie se réchauffe plus vite que le reste de la planète"

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  • Pour Jean-Marc Touzard, "La conséquence du changement climatique implique en Occitanie une accentuation des périodes de sécheresse estivales".
    Pour Jean-Marc Touzard, "La conséquence du changement climatique implique en Occitanie une accentuation des périodes de sécheresse estivales". Illustration - Pixabay
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Propos recueillis par Yannick Povillon

Jean-Marc Touzard, directeur de recherche à l’Inrae évoque les conséquences du réchauffement climatique sur l’agriculture. Et apporte des solutions pour s’adapter.

Copernicus vient de confirmer que 2023 serait l’année la plus chaude jamais enregistrée, est-ce un signe du dérèglement climatique ?

Oui, on est à + 1,46°C pour cette année 2023 à l’échelle de la planète. C’est à la fois très préoccupant mais dans la ligne de ce qui était prévu. Là on parle de la variable température moyenne mais qui implique des conséquences sur des variables climatiques bien plus préoccupantes.

+ 1,46°C cette année 2023 à l’échelle de la planète.
+ 1,46°C cette année 2023 à l’échelle de la planète.

Est-ce que ce constat s’applique à l’échelle de l’Occitanie ?

Oui, avec le Reco, le réseau d’expertise sur les changements climatiques en Occitanie, sorte de Giec régional, on a publié un cahier régional qui faisait état l’an passé d’une évolution du climat à + 2,1°C. Donc l’Occitanie se réchauffe plus vite que le reste de la planète. Et cette année, ce sera un peu plus. Si on regarde les stations de la région, on est au-dessus partout par rapport à 2022 qui était déjà l’année la plus chaude. En tout cas, on peut dire sans trop s’avancer que sur la partie méditerranéenne de l’Occitanie, 2023 sera également l’année la plus chaude.

Quelles sont les prévisions à l’échelle 2050 ?

On prévoit d’être à + 3°C en moyenne par rapport à l’ère préindustrielle sur les températures terrestres. On peut parler d’une extension du climat méditerranéen vers Toulouse.

Sans possibilité d’amélioration ?

Il faudrait répondre aux engagements de la COP21 de réduire, d’ici 2030 de 40 % les émissions de gaz à effet de serre à l’échelle mondiale et on n’en prend pas le chemin car de gros pays comme la Chine ou l’Inde continuent à émettre massivement.

Quelles sont les variables climatiques les plus préoccupantes ?

La conséquence du changement climatique implique en Occitanie une accentuation des périodes de sécheresse estivales. Et une baisse, même légère, de la pluviométrie moyenne annuelle, de l’ordre de 5 à 10 % d’ici 2050. Selon nos prévisions, il y aura aussi moins de pluie en automne et un peu plus en hiver. Alors que le nord de l’Europe et de la France vont enregistrer plutôt des hausses de pluviométrie globales. Parallèlement, avec la hausse des températures qui va générer plus d’évapotranspiration, le besoin en eau va être supérieur. Et la troisième dimension, la plus préoccupante, c’est l’instabilité, plus d’événements extrêmes en fréquence et en intensité. Mais aussi des séquences climatiques inédites comme des périodes de grand froid qui suit une période exceptionnellement chaude.

Avec d’importantes conséquences ?

Sur les écosystèmes, sur la santé, sur le littoral, la montagne… et sur l’agriculture. Sur le rendement, sur la problématique de l’irrigation… Globalement, cela va impacter la compétitivité de l’agriculture régionale.

Vous avez participé à une conférence "Aura-t-on de la vigne en Occitanie en 2050 ?", avez-vous une réponse ?

Oui, on en aura car il y a des solutions techniques comme le changement de variétés, de pratiques, l’irrigation de précision… L’Occitanie a un atout : la diversité de son agriculture. Il va falloir que la surface des vignobles se réduise et que les vignerons diversifient leur production. Il y a une vaste coopération qui permet de dire que l’on saura s’adapter grâce au partage de connaissances. Après, il ne faut pas perdre de vue que les émissions de CO2 d’aujourd’hui n’auront d’impact que vingt ans plus tard. C’est cette inertie qui est compliquée à comprendre. Mais pour les générations futures, il faut s’impliquer fortement dans la réduction de gaz à effet de serre pour avoir rapidement une stabilité du climat. À cette condition, on saura s’adapter. Si on se retrouve à + 4°C en Occitanie, on saura gérer ce réchauffement mais l’instabilité tout autour sera beaucoup plus difficile à appréhender.

2023, année la plus chaude

L’année 2023 va devenir la plus chaude jamais enregistrée après des températures records de nouveau signalées en novembre, ont déclaré les chercheurs de l’observatoire européen Copernicus sur le changement climatique.

Le mois de novembre a en effet affiché au niveau mondial une température moyenne de l’air en surface de 14,22°C, soit 0,85°C de plus que la moyenne de 1991-2020 pour le même mois, et 0,32°C de plus par rapport à la même période en 2020.

Sur janvier-novembre, la température a été supérieure de 1,46°C à la moyenne de 1850-1900 et de 0,13°C à la moyenne pour la même période en 2016, jusqu’à maintenant l’année la plus chaude jamais enregistrée, selon Copernicus.

Ces données sont publiées alors que les gouvernements mènent des négociations de longue haleine au sommet de la COP28, au sujet d’une éventuelle suppression progressive de l’utilisation des combustibles fossiles.
 

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