Le Noël des chefs cuisiniers aveyronnais : la cuisine aux accents de papi Jacques chez le Top chef Quentin Bourdy

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  • Quentin perpétue l’héritage familial dans ses assiettes.
    Quentin perpétue l’héritage familial dans ses assiettes. Centre Presse Aveyron - Jennifer Franco
Publié le , mis à jour

A Villefranche-de-Rouergue, cet enfant du pays œuvre aux fourneaux du restaurant bistronomique Jacques à dit, où il rend hommage à son grand-père.

De sa participation à "Top Chef" il y a dix ans, l’émission phare culinaire de M6, le Rouergat Quentin Bourdy retient surtout sa rencontre avec la cheffe pâtissière Noëmie Honiat (ils se sont rencontrés en 2013, lui était candidat, elle, était jurée sur la redoutable épreuve des restaurants).

Uni en cuisine comme dans la vie, le couple, parent de deux enfants (Zacharie et Evie), est installé en Aveyron. S’il ne renie pas la notoriété que le programme lui a apportée, le chef âgé de 35 ans, préfère rester loin des caméras. Rencontre.

Chez les Bourdy, la cuisine c’est une affaire de famille ?

Je suis quasiment né dans le restaurant situé de l’autre côté de la rivière, "L’Univers". C’est mon arrière-grand-père, Roger Cancé, qui l’avait repris en 1947. Sa fille unique, ma grand-mère, a commencé a travaillé très jeune dans l’établissement et s’est marié avec mon grand-père, Jacques Bourdy, qui lui n’était pas du métier.

Il l’a appris aux côtés de son beau-père. Mes grands-parents ont tenu cette maison jusqu’en 2013, année où ils m’ont transmis l’affaire.

Les racines, c’est votre ADN…

S’installer en Aveyron, c’était naturel. J’avais envie de revenir près de mes grands-parents car je les aime très forts (son grand-père est décédé en 2019, Ndlr). Et puis, tous les voyants étaient au vert pour revenir s’installer dans l’Aveyron.

Villefranche-de-Rouergue, c’est mon terrain de jeu. Après avoir beaucoup voyagé, j’avais besoin de garder une vie avec une certaine liberté et de l’espace, un bienfait que je ne trouve pas en ville. Mes racines correspondaient au mode de vie que je voulais. 

Quel chef êtes-vous ? 

Je ne suis pas un chef à concept. Je réalise à partir de ce que la nature m’offre, les producteurs me proposent. J’essaye d’exprimer mon identité, une identité du terroir. Pour moi, déjà, le restaurant est en lui-même un concept, le fait de s’asseoir, de manger.

Ma cuisine est un hommage à la cuisine que servait mon grand-père, une cuisine de plats en sauce. Même s’il savait faire plein d’autres choses, c’est cette cuisine-là que je voulais servir pour un midi. Un mélange de tradition et de modernité.

Au Jacques à dit, on sent que l’on se trouve chez quelqu’un qui a des racines. C’est une cuisine classique et dépoussiérée. Une recette à laquelle je n’ai pas touché, c’est la tête de veau de mon grand-père qu’il a élaboré avec mon arrière-grand-père il y a plus de quarante ans. Et servie dans une cassolette avec des pommes de terre et une vinaigrette très moutardée.

Que représentent les fêtes de Noël ?

Du boulot (rires). Toute mon enfance, les vacances de Noël représentaient un moment de l’année où il y avait beaucoup de travail. Dès que j’ai été en âge de porter quelques assiettes et de donner la main, je me souviens qu’entre Noël et le jour de l’An, le restaurant était archi plein.

Avec des soirées qui finissaient à 3 h, 4 h du matin, ça dansait. C’était beaucoup de joie mais aussi beaucoup de travail. Mes grands-parents se dévouaient aux clients car il y avait le restaurant mais aussi l’hôtel. Notre vie familiale était fondue à celle des clients, qui parfois étaient des amis.

Aujourd’hui, je ferme entre Noël et le Nouvel an. Parce que les temps ont changé. Je préfère être à table, en famille, avec mes enfants et ma femme. Mais je comprends parfaitement les chefs qui travaillent pendant cette période-là.

Quels souvenirs en gardez-vous ?

Le souvenir des milliers d’huîtres que mon grand-père ouvre dans la cuisine. Des sauces qui sentent la truffe. Des grandes tables qui viennent à six, huit, dix, avec les enfants et les petits-enfants. Des moments de joie, de partage, de convivialité. Même si l’exigence, elle est toute l’année, pour mon grand-père, les fêtes étaient moments qui lui tenaient à cœur. Il s’y connaissait en huître, en foie gras. C’était un bon rôtisseur et saucier.

L’amour de la cuisine, une évidence ?

Cela s’est fait naturellement. La cuisine me constitue parce que j’ai grandi dans un restaurant. J’ai quelques années d’avance sur celles et ceux qui attaquent le métier à 20 ans. Ce sont des choses qui sont imprégnées, inscrites en moi. Le restaurant s’appelle Jacques à dit, en hommage à mon grand-père. Avec Noëmie, on avait à cœur de le mettre à l’honneur.

C’est un héritage de sa cuisine même si elle est plus moderne et créative. Je me laisse porter par les saisons et je m’intéresse beaucoup à la cuisine au feu de bois dont je dispose chez moi qui apporte ce côté fumé. J’aime aller chercher des cuissons à l’ancienne.

C’est comment les fêtes chez les Bourdy-Honiat ?

On fait deux Noël. Dans ma famille, on est très traditionnel parce que justement c’est un moment de l’année où on peut se poser ensemble pour manger des huîtres, du foie gras. On est heureux ainsi. J’aime le traditionnel bien fait, les produits bien choisis.

Qui cuisine ?

Je ne cuisine pas, ce sont des huîtres, je les ouvre (rires). Avant, je faisais des lièvres à la royale, du temps de mon grand-père. On cuisine énormément toute l’année, alors on apprécie de pouvoir juste s’attabler.

Quelle transmission culinaire souhaitez-vous offrir à vos enfants ?

L’amour de cuisiner pour les gens que l’on aime.

Bio express

Né à Villefranche-de-Rouergue, Quentin Bourdy est un pur Aveyronnais, fier de ses origines. Après avoir fait le lycée hôtelier, ses armes, notamment, chez Michel Bras, il quitte son Aveyron natale où il va parcourir le monde et passe par une dizaine d’établissements. En 2012, il rejoint Jacques et Christiane Bourdy à "L’Univers". En 2013, contacté par M6, il participe à "Top Chef". La même année, il reprend les rênes de la table familiale qui ferme ses portes en 2020. En parallèle, en 2014, il rachète avec sa jeune épouse le Cotton Pub, un bar festif très connu des Villefranchois, et ouvre, au 54, avenue de la République le Jacques à dit, qui baissera le rideau en août 2024. Pour une nouvelle aventure, à la maison, à Saint-Igest, "dans la demeure des mes arrrière-arrière-grands-parents".

Sa recette pour les fêtes

Dans l’assiette : La réinterprétation du "Broussin de mon grand-père"

"Il reste toujours un peu de roquefort sur le plateau des gros repas de fêtes, et du pain parfois, voici comme les réacommoder. Je vous livre ma réinterprétation du "Broussin" de mon grand-père, sauce flambée à l’armagnac, œuf mollet et mouillettes de pain de noix (ou le reste de pain)". Bon appétit !

Ingrédients pour deux personnes
Deux œufs, du mesclun, un pain aux noix, une échalote, 50 g de roquefort, 25 g de beurre, 5 cl de crème fraîche, 15 cl d’armagnac, une pomme.

La préparation

- Faire macérer pendant deux ou trois jours du roquefort avec de l’armagnac.

- Cuire les œufs mollets et les écaler.

- Rincer quelques pousses et herbes du moment ou mesclun.

- Trancher de belles mouillettes de pain de noix et les colorer dans du beurre à feu moyen.

- Dans ce même beurre, faire suer une échalote ciselée et déglacer ; flamber avec la macération roquefort-armagnac. Ajouter un trait de crème froide et mélanger hors du feu.

- Dresser le mesclun assaisonné d’un peu d’huile de noix, dessus, l’œuf recouvert de la sauce broussin, une julienne de pommes ou poires, des noix et les mouillettes sur le côté. Inutile de saler la recette, le roquefort s’en charge.

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