Rodez. Lisette Viala, regard sur le monde d’hier et d’aujourd’hui
Indépendante. Lisette vit chez elle dans le bourg de La Rouquette grâce à l’aide de ses filles.
Jamais je n’aurais cru voir ça ! " A 91 ans, Lisette a bien entendu parler des ravages de la grippe espagnole mais une seule personne ici y avait succombé. "Il va se passer quelque chose, dans le calme ou dans l’horreur, mais ce monde court à sa perte !".
Lisette n’est pourtant pas du genre à se plaindre mais quand même… le sourire espiègle qui l’anime d’habitude a du mal à balayer l’inquiétude. Pour elle, le progrès a profité à tout le monde tout en entraînant beaucoup de méfaits et en gâchant surtout l’amour entre les gens. "Car c’est vrai qu’il y avait de la vie et de l’amitié dans nos villages autrefois. Tous les dimanches, on se rencontrait tous à la messe et on échangeait les derniers potins. C’était le cinéma des pauvres ! Et puis, il y avait un café-restaurant, ici même, au-dessus de chez nous, qui faisait office de cordonnerie et de bureau de tabac. Pas de télé, mais quelles veillées autour des grillées de châtaigne et les récoltes de noix ! Pour sûr qu’on parlait politique dans les chaumières…"
La femme de l’ancien maire s’interrompt un instant en se remémorant que tout n’était pas rose. "Il y avait bien quelques querelles ancestrales mais s’il me reste un seul regret du passé, c’est bien l’esprit de solidarité : l’entraide comblait le vide de la misère. Tenez, il n’y avait qu’une seule cabine téléphonique pour tout le village et elle se trouvait chez nous. Imaginez les va-et-vient que cela entraînait !"
La fête du village aussi reste à jamais gravée dans sa mémoire. Car tout le monde dansait sur la route et les rares voitures qui passaient devaient attendre la fin de la valse musette ! Autant dire si le nouveau marché gourmand a trouvé dans son cœur ses lettres de noblesse.
Son plus mauvais souvenir à La Rouquette ? "C’était il y a trois mois. Je m’étais endormie devant la télé et je me suis réveillée les pieds dans l’eau à cause des pluies diluviennes. Plus de téléphone, plus d’électricité ! C’est la petite-fille des habitants du château qui a appelé les pompiers."
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