Rodez. Jean-Michel Julita, cheville ouvrière de l'accès aux filles à certaines formations en Aveyron

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  • Jean-Michel Julita, inspecteur de l’Éducation nationale chargé de l’information et de l’orientation (IEN-IO).
    Jean-Michel Julita, inspecteur de l’Éducation nationale chargé de l’information et de l’orientation (IEN-IO). Repro CPA
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Propos recueillis par Anaïs Arnal

La rentrée de janvier marque le début de la seconde moitié de l’année scolaire, dernière ligne droite pour les élèves qui ont un choix d’orientation à faire. Rencontre avec Jean-Michel Julita, inspecteur de l’Éducation nationale chargé de l’information et de l’orientation (IEN-IO).

Quel est votre rôle au sein de l’Éducation nationale ?

En Aveyron, je suis le conseiller technique de Claudine Lajus, inspectrice d’académie – directrice académique des services départementaux de l’Éducation Nationale (IA-DASEN), pour la définition et la mise en œuvre de la politique nationale et académique pour l’orientation et l’affectation des élèves. Dans ce cadre, je dois veiller à ce que les établissements scolaires et les centres d’information et d’orientation (CIO) diffusent une information exhaustive, fiable et la plus neutre possible pour éclairer au mieux les élèves et leurs familles dans leur prise de décision en matière d’orientation.

J’ai aussi une fonction d’expert, notamment par l’élaboration d’études et de tableaux de bord, et une fonction de formateur pour la mise en place de l’éducation à l’orientation qui doit faire acquérir aux élèves des compétences à s’orienter qui leur serviront tout au long de leur vie chaque fois qu’ils auront à faire des choix scolaires ou professionnels.

L’orientation est un moment important, en 3e puis au lycée…

Oui. Durant la période pré-industrielle, l’orientation était une histoire de corporations et de cooptations, et l’apprentissage était le mode de formation professionnelle et de recrutement le plus répandu. En fait, on peut distinguer trois grands âges de l’orientation. Des années 1920 jusqu’aux années 1970, elle était du ressort des chambres de métiers qui évaluaient, via des tests, les aptitudes à occuper un poste de travail. Dans les années 1970, nous sommes passés de la technique à l’information. Des structures comme les CIO, l’Office national d’information sur les enseignements et les professions (Onisep) ou encore le Centre d’études et de recherches sur les qualifications (Cereq) ont été créées. À cette période de plein-emploi, il s’agissait de bien informer pour régler le problème de l’embarras du choix. Depuis les années 1990, nous avons une approche éducative de l’orientation. Avec le chômage de masse, il s’agit désormais d’aider les jeunes à s’orienter dans un monde incertain.

Vous êtes engagé dans la démarche de féminisation des filières, notamment scientifiques. Pour quelles raisons ?

Parce que cette démarche s’inscrit dans le projet de la République et le Code de l’éducation et que c’est mon rôle de la mettre en œuvre, mais aussi parce qu’elle rejoint mes convictions personnelles. Le service public de l’éducation doit contribuer à l’égalité des chances et à lutter contre les inégalités sociales et territoriales en matière de réussite scolaire et éducative. L’Éducation nationale a trois objectifs principaux : réduire le poids des déterminismes sociaux et sexués sur le niveau scolaire et l’orientation, élever le niveau général et garantir le bien-être à l’école.

On constate des écarts entre les filles et les garçons…

À niveau scolaire équivalent, les filles sont meilleures que les garçons, elles obtiennent plus de mentions au brevet des collèges et aux baccalauréats général et professionnels. Mais elles sont beaucoup moins nombreuses que les garçons à se tourner vers les sciences. En 2021, en Aveyron, après une seconde générale ou technologique, elles étaient 42 % à poursuivre vers les sciences contre 61 % des garçons. Toujours en 2021, 21 % des bachelières aveyronnaises ont accepté une proposition Parcoursup dans le secteur des sciences ou de la production – secteur qui représente un quart des emplois dans notre département – contre 38 % des garçons. Dernier chiffre parlant, selon une étude Pisa, 18 % des Françaises âgées de 15 ans envisagent d’exercer un métier dans les sciences et techniques contre 24 % des Français. Si on compare avec le Québec, très engagé dans la féminisation des filières, c’est 36 % des filles et 31 % des garçons.

Pourquoi se focaliser sur les chiffres de l’orientation vers les filières scientifiques ?

Parce que la science et l’innovation technologique participent à la marche du monde ; elles sont des moteurs de progrès pour l’humanité. Ces filières débouchent sur des emplois qui font avancer le pays et lui permettent d’être compétitif. En Aveyron, un tiers de l’emploi est productif, nous sommes le département le plus industriel d’Occitanie.

Vous nous dites que les filles font des scolarités plus brillantes que les garçons. À quel moment perdent-elles leur avantage ?

Lorsqu’elles choisissent le secteur professionnel dans lequel elles vont travailler et le poste qu’elles souhaitent occuper. Le fonctionnement discriminatoire de la société, qui fait notamment que les hommes ont la préférence lors des recrutements et qu’ils sont payés plus à poste égal, mais aussi le plafond de verre que les filles s’imposent les pénalisent. Notre démarche de féminisation des filières scientifiques, c’est aussi une lutte contre la sous-estimation des filles.

Que mettez-vous en place pour lever les freins qui conditionnent les choix d’orientation des filles ?

Au niveau du département, deux référents égalité filles-garçons ont été désignés : Caroline Féral-Soulié, principale du collège Jean-Moulin, et moi-même. Nous mettons en œuvre des actions éducatives dans le cadre du Parcours avenir pour amener plus de filles à choisir le secteur des sciences et de la production. Pour ce faire, nous travaillons en partenariat avec le campus des métiers, les chambres consulaires et la Région. Nous formons également des enseignants pour inclure la problématique de l’égalité et notamment de l’orientation des filles au cœur des enseignements. Pour obtenir des résultats, ces questions doivent être des fils rouges tout au long du parcours scolaire et toute la communauté éducative doit s’en emparer.

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