Streetwear, gaming, football : le luxe, cet adolescent qui s'ignore

(ETX Daily Up) - Nostalgie, quand tu nous tiens ! La pandémie nous a vraisemblablement tous transformés en adolescents, enfermés dans notre chambre, scotchés à nos écrans, à attendre de pouvoir sortir le soir. C'est à peine exagéré ! Mais nous ne sommes pas les seuls, les industries de la mode et du luxe ont elles aussi sauté à pieds joints dans cette période ingrate et délicate, ne jurant désormais plus que par le gaming, le streetwear, et le football.

Mais que se passe-t-il avec l'adolescence ? Pendant que les années 90 et 2000 cartonnent chez les femmes issues de la génération Z dans la mode, c'est la tendance 'kidcore' qui fait l'unanimité dans le secteur de la bijouterie, tout comme dans le vestiaire masculin. L'objectif ? S'habiller comme des ados, voire des pré-ados, en pleine croissance, autrement dit en mode débraillé, déformé, et totalement désaccordé. On est durs avec la jeunesse, c'est vrai, mais il faut reconnaître que depuis quelques mois la mode est devenue un grand brouhaha oscillant entre extravagance, pré-apocalyptique, trash, et totale régression.

Le public n'est pas le seul à avoir opéré ce retour en enfance. A travers ses trois nouvelles passions que sont le streetwear, le football, et le gaming, les industries de la mode et du luxe semblent elles aussi obnubilées par l'adolescence, et par certains de ses principaux centres d'intérêt. Un sentiment de nostalgie sans doute, ou, plus encore, la volonté de plaire - et de séduire - les générations les plus jeunes, les Z, bien évidemment, mais aussi la première vague d'Alpha, qui atteint désormais la pré-adolescence.

Des podiums à la rue…

Le phénomène n'est pas nouveau, mais il ne cesse de s'amplifier depuis des mois. A coups de sneakers, de hoodies, et de collaborations en tout genre, le monde du luxe a embrassé à pleine bouche celui du streetwear, avec l'objectif d'élargir sa cible. De Balenciaga à Louis Vuitton en passant par Chloé, Marc Jacobs, et bien sûr Jeremy Scott, les plus grandes maisons de luxe se sont progressivement converties à la mode de rue, allant jusqu'à faire défiler doudounes, sneakers, et chaines-en-or-qui-brillent sur les podiums de la Fashion Week.

Le phénomène est tel que des maisons se distinguent aujourd'hui par leur ADN associant luxe et streetwear, à l'instar de Koché, Vetements, Off-White, Y/Project, Heron Preston, et l'une des plus convoitées, Supreme. On ne compte plus les collaborations de la marque basée à New York avec les maisons les plus cotées, à commencer par Louis Vuitton, l'une des premières à avoir sauté le pas, dont les pièces se sont arrachées comme des petits pains. Timberland, The North Face, Missoni, Clarks Originals, Nike, et même Jacob & Co., du prêt-à-porter au luxe en passant par l'horlogerie, tout le monde n'a d'yeux que pour la marque de vêtements streetwear. Un engouement que l'on retrouve chez son pendant japonais, A Bathing Ape, aka Bape, qui témoigne de l'amour désormais inconditionnel du luxe pour la rue.

… En passant par les terrains de football

Si les équipes de football font depuis (très) longtemps équipe avec des marques sportswear comme adidas, Nike, ou Puma, ainsi qu'avec des griffes haut de gamme pour leurs tenues officielles, elles ne jonglent que depuis peu avec le monde du luxe. Un phénomène nouveau, mais qui ne cesse de prendre de l'ampleur. Non seulement les plus grandes maisons s'activent aujourd'hui à imaginer les costumes des stars du ballon rond, mais elles en font également des ambassadeurs de choix, à l'instar de Kylian Mbappé, devenu en quelques jours seulement la nouvelle coqueluche de Dior et Oakley. Et depuis peu, elles se muent même dans la peau de partenaires officiels, à l'image de Moncler avec l'Inter Milan.

Il faut dire que malgré la crise et les huis clos sanitaires, le football européen se compte toujours en milliards. Et ne pas oublier qu'en dehors de la page officielle d'Instagram, Cristiano Ronaldo demeure la personnalité la plus suivie dans le monde sur le réseau social avec pas moins de 394 millions d'abonnés, Lionel Messi en cumulant lui aussi plus de 300 millions. Avec plus de 65 millions de followers - petit joueur - notre Kylian national a également de quoi faire rêver les maisons de luxe dont la cible préférée passe des heures et des heures sur les réseaux sociaux. Cette nouvelle passion pour le ballon rond devrait donc se poursuivre, voire s'accentuer, dans les mois à venir.

Des gameurs en puissance

Comme si tout cela ne suffisait pas, voilà le monde du luxe qui ne lâche plus les manettes du gaming. De vrais ados, on vous l'a dit ! Le phénomène est lui aussi récent, et s'est amplifié avec la pandémie, et la plongée des plus jeunes générations - mais pas que - dans le monde virtuel. Résultat, on retrouve Louis Vuitton dans "League of Legends", Longchamp et Gucci dans "Pokémon GO", mais aussi Valentino dans "Animal Crossing : New Horizons". Et c'est sans compter sur Burberry et Balenciaga qui ont eux lancé leur propre jeu, "B Bounce" pour le premier, "Afterworld : The Age of Tomorrow" pour le second. Mais qu'on ne s'y trompe pas, si certains directeurs artistiques ont bien la fibre du gaming, à l'instar de Demna Gvasalia, le directeur artistique de Balenciaga, il s'agit ici de s'immerger dans un univers que les Z et les milléniaux connaissent mieux que personne, pour y présenter - et faire la promotion - de leurs nouvelles collections, et là encore toucher une cible difficile à séduire.

Une chose qui a déjà amené la mode, et plus largement le luxe, à embrasser une toute nouvelle passion, le métavers. Un truc d'adolescents ? On ne le sait pas encore. Ces nouveaux mondes n'en sont qu'à leurs prémices, mais il se pourrait bien qu'ils nous permettent eux aussi de retomber en enfance.