Millau : après s’être affaissé, le quartier de Bêches peut s’apaiser

Abonnés
  • Trois des six maisons du quartier ont pu être détruites depuis 2011.
    Trois des six maisons du quartier ont pu être détruites depuis 2011.
Publié le
Corentin Miralles

Une vieille histoire d'habitations construites sur des terrains instables vient de trouver son dénouement.
 

Difficile de ne pas l’avoir remarqué… Pendant trois semaines les travaux au quartier de Bêches ont repris et les feux alternants, les pelleteuses et autres engins de démolition étaient de retour, le temps de mettre à terre l’ancienne station essence. En lieu et place de cette dernière se trouve désormais un petit talus, qui aura mis plus de quinze ans à voir le jour. Tout commence en 1995, quand la famille Dega s’installe à Millau en rachetant la fameuse pompe à essence. Ils se rendent vite compte qu’un mur jouxtant leur propriété est en train de dangereusement s’affaisser. Arguant qu’ils ignoraient que ce mur était le leur et que les travaux préconisés seraient aussi coûteux qu’inutiles, les époux Dega saisissent la justice. Mais leur demande sera d’abord déboutée en première instance, puis devant la cour d’appel de Montpellier.

En parallèle, la Ville de Millau, tenue à l’époque par Jacques Godfrain, s’intéresse à l’affaire et mandate des experts géologues. Le verdict est sans appel, c’est tout le quartier Bêches qui est en danger car concerné par un glissement de terrain et un risque de coulée de boues, selon la mairie.

Par la suite, alors que le dossier est passé dans les mains de Guy Durand, la zone est classée à risque et déclarée inconstructible, les habitants doivent partir. Problème, si les Dega n’attendent que ça, la proposition d’indemnisation est en deçà de leurs attentes. Quant aux trois familles de Bêches, c’est tout bonnement hors de question pour elles de plier bagage et réclament à la mairie des travaux de consolidation sur le bas du quartier, à proximité du couple Dega. Une demande refusée par la municipalité qui invoque alors un coût exorbitant pour une absence de garantie des résultats.

Des enquêtes, des experts... et le temps passe

Qu’à cela ne tienne, les récalcitrants mandatent trois experts géologues indépendants afin de mener leur propre enquête. Et les résultats sont sans appel : les précédentes études sont jugées caduques. "Nous avons tout évalué. Nous sommes venus à trois reprises sur le terrain pour vérifier la véracité des conclusions. Nous n’avons pas observé de signes de rupture de surface qui puissent affecter les habitations. […] Nous ne voyons pas de mise en danger", expliquaient les experts en 2018.

Dans le même temps, le commissaire enquêteur, dans le cadre de l’enquête d’utilité publique, préconise des travaux sur le bas du quartier pour éviter les expropriations. Un avis que la majorité de Christophe Saint-Pierre ignore alors, invoquant comme son prédécesseur, qu’il en va de sa responsabilité, au regard des risques mentionnés dans les études.

Depuis 2011 et la décision de la Ville de détruire le quartier, seules trois maisons ont été démolies. Deux, cédées à la municipalité sous Christophe Saint-Pierre. Et la dernière, la maison des Dega, au cours du mois de février 2022. En théorie, dans le cadre de la loi Barnier, c’est l’État qui estime les biens puis verse la somme à la municipalité pour qu’elle les rachète. Si pour les deux premiers, il n’y a pas eu de souci, pour la maison des Dega cela a été plus long car le couple estimait que la proposition des pouvoirs publics n’était pas suffisante.

Finalement, un accord a été trouvé mais "il y a un reste à charge pour la mairie d’environ 40 000 € pour des raisons de désamiantage, de recyclage de matériaux… Que l’État a refusé de payer", raconte Bernard Grégoire, adjoint aux Travaux. Maintenant que le bas du quartier a laissé place à un talus, qui sera prochainement gazonné, les habitants du haut espèrent pouvoir enfin vivre en paix.

Qu’ils se rassurent, "tant que la justice ne nous obligera pas à détruire d’autres maisons, nous ne ferons rien", assure Bernard Grégoire qui précise avoir détruit la maison Dega "parce que c’est ce qui avait été convenu lors du mandat de Christophe Saint-Pierre". Après vingt longues années d’inquiétude, les derniers habitants du Bêches peuvent donc enfin dormir sur leurs deux oreilles.

Cet article est réservé aux abonnés
Accédez immédiatement à cet article
2 semaines offertes
Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?