Hausse de 42,8 % depuis le début de l'année : pourquoi le prix de la pomme de terre flambe en France ?

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  • La hausse des prix est de 42,8 % depuis le début de l’année.
    La hausse des prix est de 42,8 % depuis le début de l’année. Illustration - Pixabay
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Propos recueillis par Manuel Cudel

La hausse est de 42,8 % depuis le début de l’année pour un sac de 5 kg. Et ce n’est pas fini.

La pomme de terre, considérée jusqu’ici comme l’un des aliments de base les plus accessibles, va-t-elle devenir hors de portée de certains budgets ? Nombre de consommateurs l’ont constaté ces dernières semaines en faisant leurs courses, le prix de la patate flambe sur les étals.

Un ressenti confirmé par les statistiques de l’Insee : son prix a augmenté de 14,7 % en mai dernier sur un an, puis de 17,2 % en juin. Le sac de 5 kg de pommes de terre de conservation made in France a même explosé de 42,8 % depuis le début de l’année, en s’affichant à 1,30 € le kilo en juillet, observe FranceAgriMer. Même constat pour le filet de 2,5 kg de “pommes de terre four, frites ou purée de conservation” origine France proposé à 1,93 € le kilo, contre 1,33 € en janvier (+ 47,3 %).

« Pour les filets de pommes de terre de conservation (vapeur ou rissolée) de 2,5 kg, on est passé de 1,26 €/kg en janvier 2023 à 1,93 €/kg en juillet 2023 (53,2 % d’augmentation) », complète FranceAgriMer.

Les prix ont continué, depuis, d’augmenter, comme le montre le “Panier de BFM”. Selon les relevés réalisés par nos confrères le 1er août dans des magasins tests, le tarif du paquet de pommes de terre bio de 1,5 kg a grimpé de près de 23 % (3,75 €) en quinze jours, par rapport à la mi-juillet. « C’est la plus forte hausse constatée tous produits confondus depuis le début de notre relevé fin mai », souligne la rédaction de BFM Business.

Plusieurs facteurs expliquent cette hausse des prix : la récolte 2022 a été désastreuse, notamment en raison de la sécheresse, celle de 2023 a pris du retard à cause des fortes chaleurs de printemps, il y a donc moins de pommes de terre disponibles.

Or, quand l’offre diminue, alors que la demande reste importante, les prix s’affolent. Facteur aggravant, dans le même temps, les producteurs ont vu leurs charges s’alourdir (électricité, carburant…), des frais répercutés au moins en partie sur le ticket de caisse du consommateur.

Ces produits dont le prix a explosé depuis un an

Voilà comment l’un des aliments préférés des Français a subi une telle inflation. Depuis un an, nombre de produits ont suivi la même tendance à la hausse, confirmée le 6 juillet par des données de FranceAgriMer et de l’Insee relayées dans le quotidien La Montagne : le prix du poulet a augmenté de 4,7 %, le litre de lait de 5 %, la baguette de pain de 6,4 %, la banane de 8,8 %, le bœuf de 10 %, la courgette de 10,4 %, la pomme de 12,1 %, la boîte de six œufs de 14,3 %, le porc de 19,1 %, l’orange de 22,2 %, le poireau de 32,2 %, l’oignon de 36,6 % et la carotte de 51,3 % !

L’inflation a tout de même ralenti de manière générale en France, en juillet (+ 4,3 %), pour le troisième mois consécutif, selon l’Insee, notamment grâce à un recul des tarifs de l’énergie.

Mais les prix de l’alimentation ont, eux, progressé dans le même temps de 12,6 % sur un an en juillet. Une poussée moins forte qu’en juin (13,7 %), mais qui frappe toujours durement les Français au portefeuille.

Nos questions à Geoffroy d’Evry, président de l’Union nationale des producteurs de pommes de terre (UNPT)

Comment expliquez-vous cette hausse du prix des pommes de terre ?

C’est lié à de mauvaises récoltes en 2022 et à des retards de plantation en 2023, en lien avec la météo. De plus, comme tout le monde, nous subissons des hausses importantes de nos charges d’exploitation, à savoir le coût du gasoil, de la main-d’œuvre, de l’électricité et de nos machines qui sont spécifiques et dont le prix a bondi lui aussi en un an. Mais cette hausse de prix aurait pu être minorée si la grande distribution avait baissé ses marges. Elle prend 51 % de la marge, contre 20 % pour les producteurs.

Je pense que la grande distribution joue de ce contexte pour conforter ses marges sur les produits frais de manière générale et sur la pomme de terre en particulier. Mais cela reste, malgré tout, un produit d’appel très abordable. Avec 1 kg de pommes de terre, vous nourrissez une famille de quatre personnes pour pas cher.

Les consommateurs ne doivent pas s’attendre à une baisse des prix ?

Non, je ne sais pas ce que sera le prix demain car on est toujours dans la loi de l’offre et la demande et on aura des estimations sur la nouvelle récolte fin août ou début septembre. Il n’y aura pas, en tout cas, de pénurie de pommes de terre, on arrivera à alimenter les marchés nationaux. Mais, compte tenu des hausses de charges, il n’y a aucune raison que le prix de la pomme de terre baisse dans les semaines ou les mois à venir.

Les prix resteront élevés ?

Ils ne sont pas élevés, ils sont à la juste valeur du produit. Les producteurs sont sujets à des règles plus strictes et des contraintes environnementales, avec des aléas climatiques plus rudes et un facteur risque important. À partir du moment où vous vous lancez dans une production très élevée en termes de capitaux investis, le producteur se doit donc d’être prudent et la marchandise doit avoir une valorisation à sa juste valeur.

Les prix actuels pourraient donc devenir peu ou prou, dans ce contexte, la nouvelle norme ?

Oui, on a changé de monde, il y a une explosion des contraintes, donc pour que les jeunes générations de producteurs aient l’ambition de continuer à faire de la pomme de terre, il faut qu’ils puissent gagner de l’argent.

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