"J'étais effondrée" : après le suicide de Nicolas et le courrier de la "honte", l'ex-rectrice de Versailles témoigne

  • Nicolas était scolarisé au lycée Adrienne Bolland.
    Nicolas était scolarisé au lycée Adrienne Bolland. Google Maps - Street View
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Rectrice de l'académie de Versailles jusqu'en juillet 2023, Charline Avenel était en poste lorsqu'une lettre menaçante a été envoyée aux parents de Nicolas. Victime de harcèlement scolaire, l'élève de 15 ans s'est donné la mort début septembre.

L'affaire est surnommée "le courrier de la honte". Victime de harcèlement scolaire à Poissy, Nicolas, 15 ans, s'est suicidé le 5 septembre 2023. Il avait été retrouvé mort chez lui, avec une taie de traversin autour du cou. Ses parents, qui avaient alerté l'établissement dans lequel était scolarisé leur enfant, ont reçu, au printemps dernier, une lettre du rectorat de l'académie de Versailles. Qui continue de faire couler beaucoup d'encre.

"Ce courrier est une honte", dénonçait Gabriel Attal

En avril 2023, les parents de Nicolas alertent l'établissement sur les violences verbales et psychologiques subies par leur fils. Le directeur répond que l'adolescent aurait été victime d'un "incident unique" et que l'établissement "a mis et continue de mettre en place les actions permettant de gérer objectivement cette situation". 

Mais derrière, une lettre du rectorat affiche un teint beaucoup plus offensif.  Elle menace les parents de "dénonciations calomnieuses" parce qu'ils ont "remis en cause les fonctions et menacé de dépôt de plainte le personnel de direction". Tout parlant d'un "supposé harcèlement subi par votre enfant".

Le 16 septembre, 11 jours après le suicide de Nicolas, Gabriel Attal, fraîchement nommé ministre de l'Education nationale, déclare que "ce courrier est une honte. Nous ne sommes pas à la hauteur. Mettez-vous à la place des parents de Nicolas, qui ont écrit à l'institution, dont le rôle absolu est de protéger les élèves, pour l'informer de la détresse vécue par leur enfant et qui ont reçu ce genre de réponse".

"Je suis effondrée"

Charline Avenel, qui était à la tête du rectorat de l'académie de Versailles lorsque le courrier a été envoyé aux parents de Nicolas, a accordé un entretien à nos confrères du Parisien. Si elle a déclaré "comprendre l"indignation" qui règne autour de cette affaire, elle a surtout tenu à présenter, "en mon nom et au nom de l'institution que j'ai dirigée, des excuses aux parents de Nicolas. Il est inadmissible qu'ils aient reçu un tel courrier (...) lorsque j'ai découvert il y a une semaine, dans la presse, l'existence de ce courrier, j'étais effondrée".

La lettre datant du 4 mai 2023, la rectrice, en poste jusqu'à la mi-juillet, certifie qu'à ce moment-là, "j'étais en congés, ainsi que mon adjoint. Ce courrier n'avait pas vocation à m'être communiqué. Bien évidemment, aujourd'hui, je ne me défausse pas. Je regrette de ne pas avoir eu connaissance de ces courriers et de ne pas avoir pu m'assurer qu'on tienne compte de la détresse des familles".

Plusieurs lettres similaires ? 

Relancée sur des "réponses types" transmises par le rectorat à plusieurs familles, Charline Avenel a déclaré avoir "validé le principe de courriers adressés aux familles qui menacent les enseignants. Mais jamais pour des correspondances avec des familles dont les enfants sont victimes de harcèlement. Je découvre que ces lettres de réprobations ont été envoyées, et je le crains en nombre, sans discernement à des familles en détresse".

"Nous devons être présents pour les deux"

L'ex-rectrice a d'ailleurs rappelé que le rectorat de Versailles a connu "le drame de Samuel Paty en 2020. L'année suivant l'assassinat, nous avons eu plusieurs cas graves de menaces sur les réseaux sociaux ciblant des professeurs. Dans ce contexte, l'académie est particulièrement attentive à la protection des enseignants". Et à Charline Avenel d'insister : "je ne suis pas en train de dire que nous privilégions les uns par rapport aux autres. Mais nous devons être présents pour les deux". 

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Les commentaires (4)
Jema Il y a 7 mois Le 24/09/2023 à 16:37

Isolé chercher d'autres portes.

Milsabords Il y a 7 mois Le 24/09/2023 à 14:32

C'est pas moi, c'est l'autre, mais oui, mais oui... Si encore c'était la seule lettre de ce style, mais il semble que cette "réponse type" était habituelle,elle montre la désinvolture avec laquelle sont trail est plus que difficile d'imaginer que Mme la rectrice à qui était adressé le courrier initial (qu'elle est censée avoir lu) ignore la teneur de la réponse faite en son nom ... et si tel était le cas sa responsabilité est doublement engagée .

Milsabords Il y a 7 mois Le 24/09/2023 à 14:44

lire: "la désinvolture avec laquelle sont traitées ces affaires de harcèlement laissées à l'appréciation de subalternes , il est.."

SVPCyclo Il y a 7 mois Le 24/09/2023 à 13:37

Être désolée, être offusquée, présenter des excuses ... tout cela ne sert à rien quand l'irréparable à déjà été commis.