"J’étais monté en ville pour me suicider" : deux ans de prison pour l'agresseur au couteau du gérant d'une pizzeria de Rodez

Le 20 juin 2022, il est 21 h 18, selon les images de vidéosurveillance, lorsque ce trentenaire commence à tambouriner, à coups de pied et armé de deux couteaux, sur la porte du commissariat de Rodez. "Ouvre-moi, fils de pute", hurle notamment l’homme. Le gérant de Max Pizza, enseigne voisine, sort pour lui demander de se calmer. L’homme armé fonce alors sur lui et lui assène un coup de couteau à la gorge.

Les policiers mettent deux minutes à intervenir, le temps de s’équiper, et maîtrisent immédiatement l’homme d’un coup de taser, alors qu’il positionne l’un de ses couteaux sous sa gorge, dans ce qui s’apparente à une tentative de suicide.

"Je pensais que j’allais mourir"

À la barre du tribunal de Rodez ce lundi 23 octobre, la victime a accepté de s’exprimer. "Ce soir-là je suis sorti pour lui dire d’arrêter de gueuler. Je n’ai pas vu le couteau, juste le sang gicler de mon cou et éclabousser une voiture de police. Je pensais que j’allais mourir. Je tiens à rappeler que j’ai de la chance d’être encore là, c’est passé très proche. Aujourd’hui pour moi c’est dur de trouver le sommeil, je suis dans l’hypervigilance permanente".

"De la chance, le mot est faible, prolonge son avocat Me Cagnac. C’est de l’ordre du miracle. Le couteau est passé à quelques millimètres de la carotide. Si elle est touchée, en 6 minutes, on se vide de son sang".

Né en décembre 1996, le prévenu affirme dans ses déclarations avoir voulu viser l’épaule. Il est sous curatelle renforcée et, comme il le résume lui-même, n’a "pas eu une enfance facile" : placé en famille d’accueil dès ses 2 ans, il y a été victime de viols, de violences avant d’être interné en hôpital psychiatrique entre ses 16 et 18 ans.

"Je pensais que les policiers me tireraient dessus"

Comme il l’a déclaré aux enquêteurs, il avait décidé ce jour-là, après avoir bu les trois quarts d’une bouteille de vodka, de se rendre au commissariat de Rodez pour un suicide par procuration, c’est-à-dire en se faisant délibérément abattre par les forces de l’ordre. "Je pensais que les policiers me tireraient dessus parce que j’avais un couteau à la main", explique-t-il en ce sens.

Les trois expertises ont mis en évidence des troubles psychotiques, une déficience mentale légère et une altération du discernement au moment des faits.

"Une altération, mais pas une abolition. Il est responsable de ses actes", a plaidé la procureure de la République, qui a demandé à son encontre 4 ans de prison dont 18 mois avec sursis, ne s’opposant pas à un "aménagement de peine".

"Sa personnalité torturée permet de comprendre le dossier. Il n’est pas venu dans l’idée d’agresser des gens dans la rue", déclare son avocat Me Flavier, évoquant son "enfance difficile" et l’absence "d’intention de tuer". "On est responsable de ses actes, pas de sa personnalité ou des actes qu’on a subis. Je demande une peine utile, une peine qui soit humaine", a conclu l’avocat ruthénois.

Avant, à nouveau, des excuses du prévenu : "C’est un geste que je regrette, ce n’est pas pardonnable. Je pense tous les jours qu’il aurait pu mourir. J’étais monté en ville pour me suicider".

Le tribunal judiciaire de Rodez l’a condamné à trois ans de prison dont un avec sursis. Soit deux ans ferme pour le jeune homme, qui a déjà effectué 16 mois de détention provisoire. Les huit mois qui lui restent à purger seront aménagés et il ne retournera pas en prison. Il a par ailleurs interdiction de paraître en Aveyron, de porter une arme pendant 5 ans et devra indemniser sa victime dans des proportions qui seront décidées lors d’un second procès.