Colère des agriculteurs : "Tout le monde se fiche de nous", les apiculteurs disent être "les grands oubliés"

Publié le , mis à jour
Mathieu Roualdès

Après plusieurs mobilisations contre les importations massives de miel, la filière se mobilise de nouveau pour dénoncer une mortalité "exceptionnelle et dramatique", à la suite de l‘utilisation d’insecticides face à la FCO et la MHE.

Le jeu de mot est facile mais ô combien d’actualité : l’apiculture aveyronnaise ne bourdonne plus. Elle est même en pleine crise à en croire plusieurs de ses acteurs. Mise en pause du plan écophyto, épisodes de sécheresse, présence du frelon asiatique, effondrement des ventes après une année de production record, concurrence féroce avec l’étranger… Si les agriculteurs ont fait durant des mois la "Une" des journaux, les apiculteurs, eux, ont bien dû mal à se faire entendre.

"Tout le monde se fiche de nous", ne cache pas, agacé, Pascal Cavalié, professionnel depuis de longues années sur la commune de Pruines. Et cela le fait encore davantage rager que son métier a plutôt le vent en poupe du côté des jeunes et qu’à la différence des élevages, les ruchers se multiplient dans le département depuis plusieurs années - avec beaucoup de non-professionnels à l’œuvre.

Les importations massives

Début mars, face à la pression notamment du syndicat de la Confédération paysanne - "Le seul qui se bouge pour nous !", tiennent à souligner les apiculteurs locaux - le gouvernement a tout de même débloqué cinq millions d’euros pour la filière. Mais cela ne semble pas avoir calmé la colère. Et gommer les images particulièrement frappantes de ce début d’année, comme cette virée d’apiculteurs aveyronnais dans les rayons du grand Leclerc de Sébazac lors du mouvement de colère de l’agriculture française. À leur sortie, ils avaient posé en combinaison devant tous les produits importés du rayon des miels… Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il y avait du volume ! D’Ukraine, de Chine, d’Espagne, les miels d’imports garnissent les étals.

"Au-delà d’un petit soutien conjoncturel, activons les outils législatifs pour assainir le marché : adoptons une clause de sauvegarde économique aux frontières face aux importations de miels en dessous du prix de revient de celui produit par nos apiculteurs et une clause de sauvegarde sanitaire face aux importations de miels d’Asie", avait alors demandé la Conf’.

Le problème de la désinsectisation des élevages

Ces derniers jours, elle s’est de nouveau mobilisée aux côtés de plusieurs apiculteurs aveyronnais. Cette fois, le rendez-vous était donné dans la zone de Bel-Air à Rodez, la fédération des organismes de défense sanitaire de l’Aveyron… "À la suite des cas constatés de fièvre catarrhale ovine (FCO) et de la maladie hémorragique épizootique (MHE) pour les bovins, l’organisme a prescrit aux éleveurs de vacciner et de désinsectiser les fermes avec des produits à base de deltaméthrine. Ce dernier est censé éradiquer un moucheron, responsable de la diffusion de ces deux maladies. Mais, il tue surtout nos abeilles ! Il se retrouve notamment sur le fumier des exploitations sur lesquels les abeilles récupèrent de l’azote en automne", explique Nadia Bondia, apicultrice dans le Sud-Aveyron. Elle estime à plus de 2500 ruchers morts depuis cet automne. "C’est énorme, certains apiculteurs ont 100 % de pertes ! », s’inquiète-t-elle, sans jeter la pierre « sur les éleveurs".

"Le souci, ce sont les ordres de vétérinaires. Ils sont vendeurs et prescripteurs, cela ne pose-t-il pas un problème ? Ne savaient-ils pas que désinsectiser les fermes aurait un impact sur les abeilles ? On a simplement reçu un mail de leur part à l’automne en disant ‘‘renseignez-vous’’. C’est irréaliste. Et ça n’a pas empêché l’hécatombe", communique encore la Confédération paysanne.

Le syndicat demande aujourd’hui la reconnaissance de ces mortalités "exceptionnelles", le dédommagement des apiculteurs pour les colonies et les récoltes de printemps perdus, et la mise en place de mesures pour éviter de nouvelles mortalités, dès ce printemps alors que de nouveaux cas de FCO font leur retour, dans le Saint-Affricain notamment.

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Les commentaires (2)
Régional Il y a 20 jours Le 09/04/2024 à 18:45

En autorisant les pesticides,on met en danger de mort les abeilles, et si plus d'abeilles plus de pollinisation. Après on pleurera. L'importance des abeilles est connue et le ministre de l'agriculture s'est platement abaissé devant ces agriculteurs-pollueurs. Quant au syndicaliste à la carrure de rugbyman et qui ose parader devant les caméras de télévision avec sa casquette à l'envers, qu'est-ce qu'il en pense vraiment, tout comme le président de la FNSEA, l'homme représentatif du monde agricole avec ses 700 ha, il en dit quoi?

Milsabords Il y a 20 jours Le 09/04/2024 à 11:11

Normal, ils n'ont pas d'assez gros tracteurs pour se faire entendre d'en haut ...