Les maires aveyronnais : "On nous impose trop de contraintes"

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  • Jean-Louis Grimal, président de l’Association départementale des maires.
    Jean-Louis Grimal, président de l’Association départementale des maires. C.C.
Publié le , mis à jour
Christophe Cathala

Les maires de l’Aveyron vont se réunir en congrès vendredi 5 avril à Onet-le-Château. à un an des échéances municipales et dans un contexte financier toujours tendu, le président de l’ADM aveyronnais Jean-Louis Grimal se fait le porte-parole des élus communaux.

Dans quel état d’esprit s’ouvre ce cinquième congrès de l’ADM ?

Celui de la difficulté, pour les maires et leurs conseils, de se projeter sur l’avenir. Ce que l’on déplore, c’est la baisse des dotations : sur cinq ans, les collectivités ont perdu 13 milliards d’euros en moyens de fonctionnement, alors que l’état se décharge de plus en plus sur elles… Le congrès sera l’occasion pour les maires de faire connaître leur part de vérité et d’espérance.

La suppression de la taxe d’habitation n’est-elle pas compensée ?

Cette taxe reste encore un grand point d’interrogation pour nous. On serait compensé à 100 %, certes, mais même avec l’arrêt de la baisse des dotations, demeurera pour nous le problème de l’autonomie fiscale.

Pour retrouver cette autonomie, certains maires dès 2020 vont envisager d’augmenter cette taxe d’habitation : mais l’état suivra-t-il ?

Et comment dans un tel contexte chiffrer nos projets ? C’est un vrai souci.

Vous sentez-vous donc toujours abandonnés par l’Etat ?

Oui, et notamment sur les enjeux propres à la ruralité. Car il y a longtemps que les maires demandaient, par exemple, un moratoire sur la fermeture des services publics de l’état. On sentait bien que s’amplifiaient les fractures sociales - concernant la pauvreté ou la santé alors que nous n’avons pas les moyens d’y faire face - bien avant le mouvement des Gilets jaunes. Mais nos doléances n’ont pas été prises en compte. S’y ajoute de plus en plus la fracture numérique avec la dématérialisation des actes administratifs qui créent des difficultés dans nos zones rurales, plus encore qu’ailleurs… Il en va, globalement, de l’inégalité de traitement des territoires.

Que réclamez-vous concrètement ?

Que la loi NOTRe soit revue et corrigée quant au transfert des compétences, et notamment en ce qui concerne l’eau et l’assainissement. Nous souhaitons que soit reporté ce transfert de 2020 à 2026. Plus communément, on voudrait plus de flexibilité dans la conduite de nos communes, mais aussi des compétences fonctionnelles. Et revoir le périmètre de gouvernance qui pose le problème de la représentation de nos conseils dans les communautés de communes. L’intercommunalité, à travers ses compétences, son pouvoir décisionnel, demeure une vraie préoccupation. On peut ajouter aux doléances la transition énergétique : les maires sont sensibles au problème, mais c’est coûteux à mettre en œuvre et les aides restent insuffisantes. Le congrès sera donc l’occasion de rappeler tout cela. François Baroin, président de l’Association des maires de France, viendra nous expliquer où en sont les négociations au niveau national.

Le chiffre

  • 285

communes en Aveyron (elles étaient 304 avant l’émergence des "communes nouvelles") dont 284 composent l’Association départementale des maires. Seule Rodez, qui s’appuie notamment sur ses propres services de formation et d’information, n’adhère pas à l’ADM.

Dans un an, les citoyens vont renouveler les conseils municipaux. Ce contexte ne risque-t-il pas de brider les ambitions ou en tout cas de rebattre les cartes ?

Tout cela en effet contribue à convaincre une forte proportion d’élus à ne pas se représenter. En Aveyron, on a lancé une enquête à ce sujet. Nous sommes peu ou prou dans la moyenne nationale qui est de 50 % : la moitié des élus en exercice veulent jeter l’éponge. Il est probable que ce renoncement s’infléchisse à l’approche des élections. Rappelons qu’en 2014, le renouvellement des élus était de 38 %.

Mais en 2020, rien n’est moins sûr, car beaucoup de maires sont âgés, d’autres sont découragés par les freins de la loi NOTRe et surtout par les problèmes de compétences entre les intercommunalités et les communes. Désormais le maire n’a plus vraiment de pouvoir de décision et l’on nous impose trop de contraintes.

Par ailleurs, les candidats sur des communes de plus de mille habitants sont obligés de proposer une liste entière. Cela n’est jamais simple en milieu rural d’autant que la parité est obligatoire… Certains candidats ne viennent sur une liste que pour la compléter. Au final, ce ne sont que quelques-uns au conseil municipal qui sont motivés pour, par exemple, représenter la commune dans les différentes instances, ce qui accroît la charge de travail.

Faire grandir les communes, les regrouper, n’est-ce pas une solution ?

La formule des communes nouvelles marque le pas en Aveyron, les aides incitatives n’étant plus là. Il faudrait des territoires d’au moins 1 000 habitants et ce n’est pas le cas. La moitié des élus, en Aveyron, ne sont pas intéressés.

Et un vrai statut de l’élu n’aurait-il pas la vertu d’atténuer cette tendance au renoncement des maires ?

C’est la grande question, mais par quel bout prendre les choses ? Comment mettre en place un tel statut, qui permettrait de ne pas avoir que des retraités de bonne volonté dans les conseils municipaux ? Quelle solution trouver pour que toutes les catégories socioprofessionnelles puissent faire un mandat ? Faut-il rémunérer les élus par un salaire ? Je ne sais pas. Ils deviendraient de fait des fonctionnaires de l’état, ce n’est pas souhaitable.

Le constat demeure : avec les intercommunalités et les réunions qui se multiplient, il faut des élus de plus en plus disponibles. Or, aujourd’hui les indemnités ne payent que les frais…

François Baroin, invité du congrès le 5 avril

« Communes et communautés de communes au service des citoyens » sera le thème de la cinquième édition du congrès départemental organisé par l’ADM 12. Et son président, Jean-Louis Grimal, a invité au débat François Baroin, président de l’Association des maires de France pour évoquer devant plus de 200 édiles locaux aveyronnais les problématiques qui leur sont communes. Contraintes administratives, fiscalité locale, état et services publics, transition écologique et mobilité, parité et autre statut de l’élu seront ainsi au cœur du débat.
L’assemblée générale statutaire, dans la matinée, sera suivie dans l’après-midi d’un salon réunissant une quarantaine de stands présentés par les partenaires des collectivités, entreprises (dans le domaine de la voirie ou de la bureautique, en particulier) et institutions. Un temps fort dans la matinée : la table ronde sur le thème de la journée avec, aux côtés de Jean-Philippe Kéroslian, maire d’Onet, Jean-Louis Grimal et François Baroin, la préfète de l’Aveyron et le président du conseil départemental Jean-François Galliard. Dans l’après-midi une table ronde sera organisée sur le thème de « l’Aveyron connecté ».
Le rendez est fixé dès 9 heures à la salle des fêtes d’Onet-le-Château, vendredi 5 avril.

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