Aveyron : moins de recettes mais toujours des dépenses pour les clubs sportifs

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  • Des files d’attente devant les billetteries des stades – ici celui de Rodez –, une image du "bon vieux temps".
    Des files d’attente devant les billetteries des stades – ici celui de Rodez –, une image du "bon vieux temps". Archives Jean-Louis Bories
  • A gauche, le président du Roc handball, Benoît Courtin.
    A gauche, le président du Roc handball, Benoît Courtin. - José A. Torres
  • Les buvettes représentent une manne financière non négligeable pour les clubs aveyronnais.
    Les buvettes représentent une manne financière non négligeable pour les clubs aveyronnais. JAT
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Centre Presse

La première lame au printemps, la deuxième depuis fin octobre. Et entre-temps, un déconfinement synonyme d’intersaison et de début de compétitions tout aussi bien porteurs d’espoirs comme de sérieux doutes. Comme d’autres secteurs, celui du sport amateur est actuellement mis en très grande difficulté par la situation sanitaire du pays. Les clubs, les organisateurs de manifestations, mais aussi l’ensemble de la filière souffrent. L’Aveyron, terre d’associations s’il en est, est ainsi particulièrement touché. Les stades sont fermés, les courses pédestres, en nature comme sur route, ne se courent plus ou presque plus. Les rallyes auto sont annulés les uns après les autres, les salles de sport gardent leurs portes fermées… Derrière l’impact sportif et social, c’est également tout une économie qui trinque. Des trésoriers d’asso qui s’arrachent les cheveux pour maintenir à flot les comptes, des sponsors qui ne peuvent plus assumer leur engagement ou encore des quines et autres festivités annulées dont les recettes restent ainsi désespérément manquantes. Quel est l’état réel du secteur ? Arrivera-t-on à éviter la disparition de certains acteurs du monde sportif ? Quelles sont les solutions mises en avant ? Témoignages et explications.

Alors que leur activité est à l’arrêt depuis le début du deuxième confinement, le 30 octobre, c’est sur un autre terrain que les clubs amateurs du département se posent désormais des questions pour l’avenir, celui des finances. Car la crise sanitaire et les mesures prises pour y faire face ont porté un sérieux coup de frein aux rentrées d’argent des associations sportives.

Comme dans un scénario catastrophe, tous les types de financement, ou presque, sont concernés. À commencer par une baisse du nombre de pratiquants, alors que les licences sont l’une des principales ressources des clubs. Ce recul encore difficile à chiffrer a été observé dans de nombreuses disciplines, mais pas toujours dans les mêmes proportions. "Nous avons observé des comportements différents, relate Eric Luban, le président du club de football d’Onet-le-Château. Les parents ont pris le temps de la réflexion avant d’inscrire leurs enfants, en voulant voir comment se passe la rentrée. Par conséquent, nous avions encore beaucoup de licences en instance fin octobre." "Les gamins qu’on ne voit plus, on risque de les perdre", lance Gérard Roquefort, coprésident du club de rugby d’Espalion, qui résume la crainte de nombreux dirigeants.

Pour ne rien arranger, le partenariat, une autre importante source de financement, est aussi en berne en raison de la situation actuelle. "Parmi nos sponsors, plusieurs ont déjà le couteau sous la gorge à cause du contexte actuel, notamment dans la restauration. C’est difficile d’aller les solliciter maintenant", avance Gérard Roquefort. "Ces dernières années, nous avons développé les partenariats privés pour avoir un équilibre avec les subventions publiques, pointe Benoît Courtin, le président de Rodez Onet-le-Château handball. Mais la situation actuelle fragilise notre projet." Selon lui, la part du privé s’élève à "130 000 €" dans un budget annuel de "400 000 €" pour le Roc. Le dirigeant estime par ailleurs à "45 000 €" le manque à gagner de la saison dernière qui n’a pu aller jusqu’au bout. "Pour l’instant, il y a toujours un haut degré de confiance, positive Benoît Courtin. Nous avons dit à nos partenaires que nous avons su être ensemble quand tout allait bien et qu’il faut continuer ensemble dans une situation compliquée."

Une fidélité d’autant plus précieuse que les clubs ne peuvent pas, pour l’instant, compter sur les à-côtés habituels. Alors que l’on ne sait toujours pas à partir de quand les saisons pourront reprendre, il est fort à parier que les restrictions sanitaires qui accompagneront le déconfinement limiteront les manifestations sportives. D’éventuels huis clos pourraient ainsi handicaper les clubs qui misent sur la billetterie les jours de match. Pour les autres (la majorité dans le département), c’est la partie buvette qui est menacée. "Nous enregistrons environ 600 ou 700 € de bénéfice par match à domicile", indique Gérard Roquefort. Une somme non négligeable pour Espalion, alors que l’entrée au stade est gratuite. Cette saison, le club a d’ailleurs dû s’en passer lors de sa première rencontre à domicile, à cause d’un arrêté municipal. "Par conséquent, nous n’avions pas eu d’entrées d’argent ce jour-là, poursuit le coprésident. Par la suite, le maire avait compris notre problème et a retiré son arrêté. Le match d’après, nous avions pu ouvrir la buvette en interdisant de rester au comptoir et en mettant un sens de circulation. Cela nous a permis d’avoir une recette, même si elle n’était pas aussi importante qu’habituellement." Et d’illustrer les conséquences des décisions des autorités sur le fonctionnement des clubs.

Par ailleurs, les rassemblements pour des événements festifs, comme les quines ou les repas sont aussi fortement menacés. "Nous faisons trois repas par an qui rapportent près de 2000 € chacun et un loto avec près de 10 000 € de bénéfice", liste Gérard Roquefort. "Nous avions des idées d’animation dans notre nouveau stade et nous avons renoncé, en fin de saison dernière, à notre tournoi international U13, précise pour sa part le Castonétois Eric Luban. Ce ne sont pas forcément des grosses rentrées d’argent, mais mis bout à bout, cela commence à faire quelque chose d’important…"

Et leurs absences vont être d’autant plus préjudiciables que les dépenses ont continué malgré l’arrêt des recettes. "Ce n’est pas parce que nous sommes à l’arrêt que nous n’avons plus de coûts", interpelle Benoît Courtin. Même si les clubs ont pu bénéficier du chômage partiel pour ceux qui ont des salariés, ou même d’aides fédérales dans certains sports, de nombreuses dépenses incompressibles sont toujours présentes, quelles que soient les disciplines. Cela concerne notamment l’achat de tenues et d’équipements, les frais d’engagement des équipes ou encore les assurances. Sans oublier les frais de déplacement, interrompus pour l’instant mais qui reprendront en même temps que la compétition.

La crise sanitaire rend encore plus difficile l’équilibre économique des clubs amateurs. Une situation partagée par les plus modestes, au niveau départemental, comme par ceux qui fréquentent les divisions nationales non professionnelles. "Le Roc compte une dizaine de salariés, souligne Benoît Courtin, dont le club est représenté en National 2 chez les garçons et National 3 chez les filles. Nous sommes considérés comme amateurs, mais sans l’être en réalité. Nous sommes un peu à la frontière et nous avons l’impression que cette nuance n’a pas été prise en compte dans les décisions gouvernementales." Car quel que soit leur niveau, les clubs amateurs sont à l’arrêt. Et se posent des questions sur leur avenir.

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