Couteau de Laguiole : "Pour le futur, c’est une opportunité de pérenniser les entreprises"

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  • Honoré Durand, président du syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de Laguiole.
    Honoré Durand, président du syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de Laguiole.
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Propos recueillis par Guilhem Richaud

Honoré Durand, coutelier, est également le président du syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de Laguiole, qui regroupe les sept principales entreprises produisant le couteau.

Pourquoi cette volonté d’obtenir cette indication géographique ?

Laguiole avait été moteur pour la création de la loi française sur les indications géographiques (IG) protégeant les produits industriels et artisanaux, créé par Benoit Hamon en 2014. Jusque-là, les IG existaient peu en Europe, mais beaucoup dans le reste du monde. La France était en retard. Les couteliers de Laguiole étaient à l’origine de cette demande auprès du gouvernement.

Pourquoi l’IG est capitale pour les couteliers de Laguiole ?

Aujourd’hui, on se retrouve avec des consommateurs, qui quand ils achètent un couteau marqué Laguiole, ne savent pas ou il a été produit. Il y a des gens, en France, mais aussi à l’étranger, qui vendent des couteaux qui ne sont pas fabriqués ici, mais qui disent, quand ils les vendent, que c’est le cas. Cela nous fait un tort considérable. Ce sont d’abord des couteaux que nous ne vendons pas, mais surtout, ce sont souvent des produits de mauvaise qualité. Quand ils explosent au bout de cinq jours ou de dix passages au lave-vaisselle, le consommateur n’est pas content et ne rachètera jamais un couteau Laguiole.

La procédure avance, on est arrivé dans la phase de l’enquête publique. Qu’en attendez-vous ?

N’importe qui peut émettre un avis sur ce dossier. Il nous reste encore deux semaines pour que les consommateurs, mais aussi les institutionnels, laissent des avis. On a reçu des soutiens très importants de nos députés et sénateurs, mais aussi de nombreux maires, surtout du Nord-Aveyron, qui disent que cette IG est importante pour valoriser le territoire, garder les emplois et l’économie qui tourne autour. Le couteau de Laguiole amène des enfants dans les écoles, fait vivre les commerces et permet de garder de l’activité ici. Si les couteaux disparaissent du Nord-Aveyron, ce sont des familles entières qui partiront.

Vous êtes actuellement sept entreprises au sein du syndicat. L’objectif va être d’attirer des fabricants supplémentaires ?

Attirer, le mot est excessif. Au niveau du syndicat, on a défini qu’un fabricant est une entreprise qui produit les lames et les pièces. On a distingué les fabricants des monteurs. Pour déposer une IG, il faut être représentatif du métier. Les sept membres représentent 15 millions d’euros sur 16 estimés que génère en chiffre d’affaires le couteau Laguiole. Cela représente également 220 emplois sur 235. On est donc largement représentatifs. Le but est d’avoir un syndicat encore plus fort, mais si les gens ne veulent pas venir, on n’est pas là pour les absorber. Chacun est libre de sa politique commerciale. Mais je pense qu’effectivement, si on obtient l’IG, ils auront tout intérêt à rentrer dans le syndicat. Sinon, ils ne pourront pas utiliser le label.

L’obtention de cette IG mettra-t-elle fin à un combat pour protéger le couteau ?

Ce n’est pas un combat. On est dans notre droit et je pense qu’on est aussi dans la demande du consommateur. Ce serait surtout une reconnaissance de notre travail depuis des années. On a fait un cahier des charges très strict qu’il nous enferme dans certains carcans. Le but, c’est qu’il n’y ait pas une lame fabriquée à Tataouine dont on puisse dire que c’est un couteau de Laguiole. Si dans le passé, ça a eu lieu, aujourd’hui, on a mis en place un cahier des charges très strict et très clair. Ce n’est pas un combat, c’est la finalité des choses. On veut que le couteau revienne à Laguiole. Pour le futur, c’est aussi une opportunité de pérenniser les entreprises.

Ce cahier des charges a été compliqué à établir ?

Pas du tout car on est sur la même gamme de produits. On les fabrique tous exactement de cette manière. On a tous la même vision de ce que doit être le couteau Laguiole dans le futur. On a tous pris nos gammes actuelles et on a dit qu’on ne voulait pas faire moins bien. On fait tous des produits de très bonne qualité.

Si vous obtenez l’IG, il faudra ensuite la faire respecter, notamment en attaquant ceux qui s’en prévalent sans en avoir le droit. Comment faire quand on est un petit syndicat comme le vôtre avec des moyens limités ?

On verra. Pour l’instant on n’en est pas là. On sait que ce sera un gros travail. On n’est pas des multinationales et on n’a pas des moyens illimités. Jusqu’à il y a quelques mois, on n’avait pas eu de subventions publiques, c’était notre argent à nous. Quand le syndicat attaque un site internet sur lequel des produits chinois ou pakistanais sont marqués comme venant de Laguiole, on défend avant tout l’image de la commune.

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