"Personne n'est parfait sur le plan écologique, mais tout le monde détient le potentiel d'évoluer" (Kate Williams, CEO de 1% for the Planet)

  • Kate Williams, CEO de l'ONG 1% for the Planet.
    Kate Williams, CEO de l'ONG 1% for the Planet. Sarah Kjelleren
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ETX Daily Up

(ETX Daily Up) - Inciter les entreprises à reverser 1% de leurs revenus annuels à une association ou une ONG qui œuvre pour l’environnement et les accompagner dans leur démarche. C’est l’objectif de 1% de For the Planet, ONG fondée en 2002. Nous avons rencontré sa CEO Kate Williams.

Créée il y a vingt ans par le PDG de Patagonia Yvon Chouinard et Craig Mathews, fondateur de Blue Ribbon Flies, l'ONG 1% for the Planet encourage et certifie la philanthropie environnementale des entreprises à travers le monde. Son objectif premier ? Montrer aux entreprises qu'elles peuvent être florissantes tout en s'engageant pour la planète en les incitant à reverser 1% de leurs revenus annuels à des associations pro-environnementales. Une démarche que les deux co-fondateurs ont d'ailleurs mise en application avec leurs entreprises respectives (Patagonia et Blue Ribbon Flies).

Le travail réalisé par l'ONG depuis sa création a permis de consacrer plus de 350 millions de dollars à des associations environnementales. Son siège social est situé à Burlington dans le Vermont aux États-Unis, mais elle possède également une branche basée en France. En octobre dernier, 1% for the Planet a célébré ses vingt ans d'existence. L'occasion pour sa CEO Kate Williams de revenir sur les succès et les futurs projets de l'ONG.

Votre ONG vient de souffler sa vingtième bougie. Selon vous, quel est son plus grand succès ?

Nous mesurons notre succès par le montant des dons que nous impulsons. Et depuis 2020, nous avons observé une énorme accélération du nombre de nos membres et du montant des dons. Cette année a été, comme chacun le sait, celle du Covid et d'un contexte de grandes incertitudes. Nous sommes donc très fiers d'avoir doublé nos dons à cette période, qui constituent notre véritable mesure d'impact en ces temps difficiles.

Notre rôle consiste à aider les entreprises qui souhaitent devenir membres à comprendre comment mettre en œuvre leurs dons, car cela peut représenter un véritable défi. Nous les guidons également dans le choix des dons qu'elles souhaitent réaliser, ainsi que sur la meilleure manière de communiquer sur ces actions auprès de leurs clients.

Comment sélectionnez-vous les entreprises qui adhèrent à votre programme ? Ciblez-vous des secteurs particuliers ?

Nous mettons un point d'honneur à ce que le plus grand nombre possible d'entreprises adhère au "modèle du 1%". Nous partons du principe que nos membres n'ont pas nécessairement besoin d'être "parfaits". Déjà, parce que nous pensons sincèrement que personne ne l'est, mais que tout le monde détient le potentiel d'évoluer.

Ensuite, parce que nous manquerions une réelle opportunité de changer le monde si nous excluions toutes ces entreprises. Le plus important pour nous est qu'une réelle intention d'opérer un changement soit exprimée. Vous n'avez jamais fait de don auparavant ? Aucun problème ! L’important est que vous soyez prêt à participer. Nous nous réservons toutefois le droit de ne pas accepter des entreprises qui, à notre avis, pourraient nuire à ce que nous voulons représenter. Mais cela reste assez rare dans les faits.

Est-ce déjà arrivé ?

Nous avons déjà eu le cas avec une entreprise de bouteille d’eau en plastique. Nous avons des compagnies spécialisées dans ces produits, mais elles utilisent des matériaux recyclés ou contribuent d'une manière ou d'une autre à limiter l'usage unique du plastique. Le problème avec l’entreprise en question était qu’elle ne respectait justement pas ce type d’engagement. Nous lui avons donc demandé de se retirer du programme.

Nous avons également été approchés par des entreprises d’armes à feu que nous avons dû refuser, car nous partons du fait qu’il n'y a pas suffisamment de preuves pour garantir que les armes ne sont pas utilisées à des fins violentes. Nous ne comptons pas non plus d'entreprises de cigarettes parmi nos membres. En revanche, nous commençons à faire appel à certaines entreprises spécialisées dans le secteur du cannabis.

Quels sont les projets pour le futur ?

Nous souhaitons poursuivre sur cette croissance encourageante de dons. Et pour y parvenir, nous allons nous concentrer sur deux leviers d’action principaux. Le premier consiste à accroître le nombre de nos membres, en élargissant notre cible aux secteurs d'activité et aux régions géographiques. Nous sommes présents dans environ 65 industries différentes, dans environ 60 pays. Donc, nous avons déjà une empreinte assez large et diversifiée.

Nous avons par ailleurs constaté une augmentation du nombre de grandes entreprises qui s'engagent et c'est un puissant levier pour nous, car ces marques véhiculent également une histoire forte sur l'importance de s'engager dans cette voie. Nous recevons beaucoup de bonnes recommandations d'autres membres, parce que l'engagement de pair à pair est vraiment puissant. L'objectif est de prendre une marque leader, expliquer comment elle fonctionne et en attirer d'autres dans le même domaine. Par exemple avec la société Pucka Tea, une marque de thé assez importante au niveau mondial et qui a fait un travail remarquable de storytelling pour raconter l'impact de son action basée sur le modèle du 1%.

Nous avons aussi mis en place de nouvelles méthodes pour créer des mouvements et générer des revenus dans le cadre de notre croissance, notamment du côté des membres, afin d'avoir plus d'impact. L'année dernière, nous avons créé un nouvel outil appelé Planet Impact Fund, conçu de manière à ce que les fonds philanthropiques soient investis dans des actions positives pour le climat. Il est accessible aux membres, mais aussi aux non-membres.

Quelles sont les raisons qui vous ont poussé à devenir CEO de 1% for the Planet ? Quel est votre parcours ?

Depuis le début de ma carrière, j'ai travaillé dans l'espoir de chercher des moyens pour inciter les gens à s'engager et à soutenir de manière significative les questions environnementales. J'ai commencé comme éducatrice avec la méthode de la pédagogie de plein air, parce que je considérais que si je pouvais aider les gens à aller dans des endroits sauvages et les soutenir dans cette expérience, cela leur permettrait de tomber amoureux de la nature et de s'engager pour la préserver. J'ai ensuite travaillé pour des organisations environnementales à but non lucratif, en partie parce que j'avais passé beaucoup de temps sur le terrain et que j'étais prête à passer à autre chose. Mais aussi parce que je voulais être de "l'autre côté", pour défendre la protection de ces écosystèmes.

Je crois que l'aspect humain est ce qui m'anime depuis toujours, à la fois dans ma vie et dans ma carrière. Comment convaincre, réunir et fédérer les gens pour les aider à s'engager pour une cause qui leur est chère et devenir acteur pour opérer un changement ? J'ai toujours été fascinée par ces questions et je pense que c'est cela qui m'a dirigée vers 1% for the Planet. J'ai commencé à travailler pour l'ONG en 2014 et je suis devenue CEO en 2015. Une opportunité pour ma carrière dont je rêvais, car ce poste implique de rassembler divers secteurs, individus et entreprises autour d'un objectif commun, à savoir créer un impact positif pour la planète, de toutes les manières possibles.

D'où vient votre engagement écologique ?

D'abord de ma famille : j'ai passé beaucoup de temps à l'extérieur lorsque j'étais enfant, nous allions souvent camper. Je pense donc que cela a joué un rôle. Mais je crois que le tournant décisif a eu lieu l'année de mes 18 ans. J'ai eu la chance de passer un mois dans les grandes montagnes de l'Ouest américain et j'ai été époustouflée. Je pense que c'est l'amour pour cet endroit si sauvage et le fait de vivre cette expérience intense au milieu d'un groupe de personnes qui m'ont donné l'envie de contribuer à la protection de la nature et d'emmener des gens avec moi dans ce combat. Ce que je n'ai finalement jamais arrêté de faire !

Que pensez-vous de la manière dont les jeunes d'aujourd'hui se battent pour la planète ?

Je suis ravie, inspirée et pleine d'espoir quand je vois ces jeunes. Je pense notamment à ceux de notre ONG, qui sont formidables et si passionnés ! On parle beaucoup de l'écoanxiété que beaucoup de membres de cette génération ressentent. Et ce que je trouve vraiment encourageant, c'est de voir que ces jeunes ne restent pas paralysés. Au contraire, ils s'efforcent de comprendre les enjeux climatiques, partent à la rencontre des communautés, intentent des procès concernant le changement climatique... Ils sont en mesure d'éduquer les générations plus âgées sur les actions qui doivent être prises. Ils semblent déterminés à faire bouger les choses, à prendre le relais de ceux qui n'ont pas atteint les grands objectifs climatiques et semblent galvanisés pour continuer à faire ce travail, si important pour les générations futures. J'ai moi-même deux de ces jeunes, mon fils et ma fille, qui ont une vingtaine d'années. Ils font partie de ceux qui sont vraiment engagés dans ce travail et dans la création d'un avenir meilleur.

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