Loi immigration rejetée : comment l'exécutif tente désormais de sortir de l'impasse

  • Emmanuel Macron dans l'impasse après l'épisode du rejet de la loi immigration ?
    Emmanuel Macron dans l'impasse après l'épisode du rejet de la loi immigration ? MAXPPP - Luc Nobout
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Christelle Bertrand

L’Élysée, qui visiblement n’a pas vu venir l’échec, a repris les choses en main depuis ce soir du lundi 11 décembre 2023. Le Président souhaite la tenue rapide d’une Commission mixte paritaire afin de tourner la page.
 

"Plus on va haut dans la hiérarchie politique, moins ils ont conscience que nous sommes en majorité relative." Il est très tard dans la nuit de lundi à mardi, lorsque se confie, mi-dépité mi-épuisé, ce conseiller de la majorité. Ses pensées vont vers l’Élysée. Vers Emmanuel Macron, vers Alexis Kohler, le secrétaire général du Château, qui, d’après lui, n’ont pas vu venir l’échec, estimant que la motion de rejet n’était qu’un mauvais moment à passer. Une formalité qui vient pourtant de faire basculer le quinquennat.

"En terres inconnues"

"Désormais, nous sommes en terres inconnues", commentait mardi un député. Certains en veulent un peu au Président de ne pas s’être plus investi. "Sur ce projet de loi, nous n’avons eu aucun contact avec l’Élysée mais pas plus que sur le projet de loi justice ou l’industrie verte", commentait lundi un porte-parole du groupe Renaissance à l’Assemblée. "Il y a des cabinets ministériels qui nous appelaient pour avoir notre avis mais jamais l’Élysée", ajoutait un autre député chargé du texte. Qui nuançait cependant : "ça n’était pas au Président de porter ce texte mais à nous tous députés."
Reste qu’auprès de ceux qui bataillent depuis des mois pour que le projet de loi sur l’immigration, voulu par le candidat Macron, soit voté, le déplacement du chef de l’État lundi à Toulouse passe mal, par exemple.

La Commission mixte paritaire

Certains auraient aimé le savoir à la barre derrière son bureau de la rue du Faubourg- Saint-Honoré. D’autres se sont étranglés en lisant dans Le Parisien qu’Alexis Kohler, lundi en début d’après-midi, avait réuni les cadres de la majorité pour discuter de… l’opportunité d’organiser ou non un vote solennel à l’issue des débats. "Kohler, c’est lui le filtre de l’Élysée, or il est toujours un peu hors sol. Et puis, ils ont dû avoir des garanties (de certains LR, NDLR) qui n’ont pas été respectées", excusait, mardi, un député chargé du texte. Désormais, l’Élysée veut tourner la page au plus vite.

C’est pourquoi Emmanuel Macron, qui a repris les rênes depuis lundi soir, a exigé une réunion rapide de la Commission mixte paritaire (Yoann Gillet, député RN du Gard, en fera partie).
Mardi, certains députés le regrettaient. "Je préférerais une CMP à la rentrée de janvier parce qu’en ce moment, les LR se sentent tout puissants. De plus, cela nous permettrait de discuter encore de certains détails et d’aboutir à une CMP conclusive. Mais le Président ne veut pas », nous expliquait un élu chargé du texte.

"Il a besoin de remettre du souffle"

En effet, l’Élysée aimerait, après les fêtes, pouvoir se projeter vers l’avenir et aborder des thématiques plus optimistes. "Il faut désormais que l’on parle social, amélioration de la vie quotidienne des Français", nous assure un député de l’est de la France.

Emmanuel Macron a lancé récemment l’idée d’un grand "rendez-vous avec la Nation" en janvier. Mais dans la majorité, les troupes sont dubitatives. "Nous n’en savons pas plus mais nous sommes habitués", commentait mardi, un élu blasé. "J’ai fait des télés tout le week-end, les journalistes m’ont demandé ce que c’était que cette initiative, j’ai dû jouer de la flûte car je n’en sais rien. On a eu des CNR, des Saint-Denis… Je ne suis pas certaine qu’un énième Ségur du Grenelle change quoi que ce soit car pas un Français n’y croit encore", complétait une autre députée. "Je pense que le Président lui-même ne sait pas ce qu’il veut faire, ajoutait-elle. Cela illustre une chose cependant, c’est qu’Emmanuel Macron a conscience qu’il a besoin de remettre du souffle, de remettre du vent dans les voiles du quinquennat."

Dure à tourner

Mais la page immigration va être dure à tourner. Pour les élus de la majorité, mardi, une seule chose était certaine : l’idée d’un 49.3 a été totalement abandonnée car, nous assurait l’un d’eux, "on sait que cette fois les oppositions voteraient une motion de censure".

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