Le tour de l'Aveyron à scooter – dernière étape, dernier épisode : portraits d'un été à Rodelle

  • Rodelle.
    Rodelle. LR -
  • Le "Téton" de Rodelle.
    Le "Téton" de Rodelle. LR -
Publié le , mis à jour
Laurent Roustan

Ce tour de l'Aveyron est fini ! Le scooter est parti à l'aventure quasi complète sur les petites routes du département, défiant chaleur, pluie et pépins mécaniques, à la rencontre de beaux paysages et de belles gens. Ou l'art de se déconfiner complètement.
Après plus d'un millier de kilomètres parcourus, l'aventure se termine bien sûr en transformant le point de départ en arrivée, à Rodelle. Rencontres estivales.

 

Antoine, Alex et Erwan, chasseurs de fantômes.
Antoine, Alex et Erwan, chasseurs de fantômes. LR -

La Petite auberge, de la malédiction à la résurrection

La Petite auberge de Bezonnes attendait de rouvrir, quasiment de renaître. Pourtant excellemment bien placée au carrefour de deux routes, certains pensaient que l'endroit était maudit, voire hanté. Durant deux gérances (deux couples qui ont tenu l'auberge consécutivement autour des années 2010), l'on racontait des histoires de fantômes, de mariés morts à l'auberge durant leurs noces. Ces couples d'ailleurs se sont séparés avant de passer la main. Ensuite, ce fut une famille qui reprit l'affaire, venue de Savoie, et c'est un euphémisme de dire qu'elle n'avait vraiment pas la fibre commerçante, si bien que la Petite auberge fut désertée par la quasi-totalité de sa clientèle d'alors. Malédiction encore lorsqu'une ancienne employée de l'auberge voulut reprendre le flambeau au début de cette année, la crise du coronavirus frappant quelques jours avant l'ouverture prévue. La demoiselle a jeté l'éponge.

Mais il y avait Antoine. Originaire de Bezonnes, ce jeune homme qui a déjà un casier culinaire conséquent (après un BTS à Saint-Chély d'Apcher, il a travaillé à Paris, Tokyo…) était coincé ici avec le confinement et passait tous les jours devant la Petite auberge. Jusqu'à se décider à reprendre l'affaire en enrôlant deux copains comme associés, Alex le Montpelliérain, et Erwan qui vit à... Washington. Et la malédiction supposée du lieu ne l'effraie pas du tout : « On a fait ce qu'il fallait, on a sacrifié un bœuf à la pleine lune », plaisante-t-il.

Et ça marche ! Depuis son ouverture le 11 juillet, la Petite auberge ne désemplit pas. Bonne musique, nouvelle déco, terrasse ornée de canapés et de fauteuils, et même un terrain de pétanque, après une campagne de communication via les réseaux sociaux, la clientèle est éclectique, d'ici et d'ailleurs, et l'ambiance assez festive lavée de tous démons. Un menu plutôt ouvrier à midi, et le soir, des formules façon tapas avec des plats à partager ou à découvrir.

Une résurrection !

 

André, le théâtre au corps.
André, le théâtre au corps. LR -

Une fontaine d'images, une mare de culture

André a acheté il y a cinq ans l'ancien presbytère de Rodelle, accolé à l'église, et peu à peu, le bonhomme y fait son trou, venant chaque vacances et entraînant dans son sillage troubadours, gens de plume et simples amis. Ancien cascadeur équestre, entre autres choses, et aujourd'hui metteur en scène et directeur artistique « encore en activité », il a créé en banlieue parisienne la compagnie la Fontaine aux images il y a une trentaine d'années, laquelle a installé, en 2005 après les émeutes des banlieues, un chapiteau dans un cadre champêtre, à Clichy-sous-Bois, un lieu qui propose des animations culturelles tous azimuts. Aujourd'hui, c'est sa fille Lisa qui gère le chapiteau, même si André n'est jamais loin...

Venu retrouver ses vieilles racines aveyronnaises (son arrière-grand-mère est de La Salvetat-Peyralès), André souhaite « faire glisser mon travail de Paris à ici », dit-il, notamment sur la base d'un premier projet « à cheval entre la ville et la campagne, qui s'appelle Monstres des villes et monstres des champs, et axé sur les peurs qui nous habitent ». Pour ce faire, il est allé visiter cet été quelques infrastructures culturelles de la région ruthénoise comme le Club ou Station A, ou bientôt les services culturels de Rodez, dans le but d'y faire résidence et de finaliser ce projet.

Paris qu'il va rejoindre en cette fin de mois lui manquant de moins en moins, le « néo-presbytérien » rodellois attend de voir jaillir en Aveyron une résurgence de sa Fontaine aux image en s'occupant de son antique demeure, par exemple en y creusant une mare dans le jardin. Et il y a déjà des poissons rouges…

 

Grégoire et ses pains.
Grégoire et ses pains. LR -

Le bel été du pain de Talou

A Saint-Julien-de-Rodelle, à quelques encâblures de la commune, Grégoire a lancé il y a trois ans le Fournil de Talou, du nom du lieu-dit où il vit en famille. Formé à la boulange, ce jeune trentenaire propose depuis différents pains en mode artisanal, de campagne, à l'épeautre ou au seigle. « Ce sont des pains au levain, dit-il, avec de la farine locale faite sur des meules de pierre, en bio et en fermatation lente. » Travaillant avec son frère Edouard, Grégoire propose sa production (environ 250 pains à chaque fois) sur les marché de Bozouls, de Rodez et de Laissac, plus quelques points de dépôts. « Ce que je privilégie, c'est un goût plus authentique, même si je ne suis pas contre la technologie. Au contraire, je trouve que ça améliore la méthode ancestrale » C'est devant un four électrique qu'il se met vers les 2 heures et demi du matin pour produire ses pains qui ont régalé les alentours durant le confinement. Pas grave, « je suis un matinal, assure-t-il, même si j'aimerais trouver un nouveau boulanger pour que nos horaires de travail soient un peu plus réguliers ».

Pour l'instant, il est donc un peu au four et au moulin, mais quand on est boulanger…

 

Pascale parcourt le monde.
Pascale parcourt le monde. LR -

Rodelle entre Dakar et Rome

Après une mission de 5 ans à superviser les écoles françaises d'Afrique depuis le Sénégal (du Mali au Cap Vert en passant par la Côte d'Ivoire ou l'Afrique du Sud notamment), Pascale comptait bien cet été profiter de sa maison de Rodelle qu'elle a acquise il y a une dizaine d'années. Mais la crise sanitaire est passée par là, et l'ancienne inspectrice d'académie en Aveyron s'est vue coincée à Dakar jusqu'aux alentours de la mi-juillet. Devant visiter aussi ses parents à Sète après son confinement africain, elle n'a passé en tout et pour tout que 10 jours ici, bien peu à son goût. D'autant plus que sa nouvelle mission l'envoie ce lundi à Rome où, depuis la villa Borghese, ce sont toutes les écoles du nord du Bassin méditerranéen qu'elle sera chargée de visiter, de Rome à Ramallah. « Même si je ne réalise pas trop encore que je ne vais plus voir mes amis de Dakar », soupire-t-elle. Devenue globe trotteuse de métier (sa fille vit également à Edimbourgh et elle ne dédaigne pas d'aller se balader à New York), Pascale ne lâcherait pourtant pour rien au monde sa demeure rodelloise, où lorsqu'elle y est (c'est désormais presque une tradition), elle invite les voisins sur son balcon pour un apéritif, en toute décontraction. Santé, Pascale !

 

Le village a retrouvé modestement son activité viticole.
Le village a retrouvé modestement son activité viticole. LR -

Le vin des copains

Il y a un siècle, tous les flancs de montagne autour de Rodelle (qui s’appelait Ruthenula en latin, soit « le petit Rodez ») étaient encore cultivés, plantés notamment de vignes pour une bonne part.Décimée par les guerres, la population agricole a depuis laissé la forêt reprendre ses droits, mais certaines vignes vivotaient ça et là. Rodelle a depuis retrouvé certaines couleurs et vers 1998, « pour qu'elles ne soient pas complètement abandonnées », Manu Fric a repris quelques vignes de la côte du même nom, les a remises en état et les a entretenues avec des copains, apprenant ainsi sur le tas l’art de la viticulture.Aujourd’hui, Manu travaille au domaine de Mioula à Marcillac depuis une vingtaine d'années déjà, et a fini par produire à Rodelle, pour une consommation dite « familiale , du vin rouge type mansois, et un petit vin blanc frais et léger pas piqué des hannetons. Et en septembre, les vendanges s'annoncent. Presque comme il y a 100 ans… mais en format réduit.

 

A la ferme de Mayrinhac.
A la ferme de Mayrinhac. LR -

Une chenille chez les cochons

Tout est bon dans le cochon. A Mayrinhac, Pierre et son fils Guillaume le savent bien, eux qui élèvent puis transforment les cochons en saucisses fraîches au sèches, côtelettes, rôtis et autres charcuteries. A l'artisanale, pas de manière industrielle.

Mais cet été, ce sont d'autres bébêtes qui se sont invités à la ferme: les insectes. Durant deux mois, un duo de réalisateurs ont tourné un documentaire à la ferme sur la vie des insectes, dont la star est une chenille, que l'on pourra voir sur France 5. Ils ont même construit un studio de cinéma avec des décors à la mesure des bestioles pour avoir l'image la plus jolie possible. Ces jours-ci, l'équipe reviendra pour tourner les derniers plans et peaufiner quelques scènes avant le travail de montage du documentaire. Et leurs acteurs ? Pas sûrs que Pierre et Guillaume se lancent dans la salaison d'insectes, quant à la "star" chenille, puisse ce rôle la transformer en papillon...

Le reportage de France 3 réalisé au début du mois

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