Aveyron : à Millau, restaurants recherchent cuisiniers désespérément

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  • En service, les restaurants ont toujours des candidatures. Ce n’est pas le cas en cuisine.
    En service, les restaurants ont toujours des candidatures. Ce n’est pas le cas en cuisine.
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Clara Guichon

Une tendance avec laquelle, en pleine saison estivale, la profession doit composer.

En mai dernier, Michel Santos, le représentant des restaurants, cafés et hôtels de l’Aveyron tiraient la sonnette d’alarme, prévenant que certains établissements peineraient à ouvrir, cet été, vu les difficultés de recrutement en saisonnier.

Travailler au ralenti

Une crainte qui, pour certains, est devenue réalité. "J’ai décidé de fermer le mardi et le mercredi midi", explique Didier Loubat, gérant de Côté Marché. Les années précédentes, ce restaurant connu pour ses moules frites, sur la place Foch de Millau, ouvrait 7 jours sur 7. "Je n’ai pas trouvé de second cuisinier, précise-t-il. Début juin, j’ai opté pour cette solution, quand j’ai vu que je n’arriverai pas à former deux équipes qui se relaieraient."

Pas un seul CV

"Certains professionnels travaillent au ralenti, ajoute Yannick Chopin, vice-président de l’Umih (Union des métiers et industries de l’hôtellerie). Ils font, par exemple, un service au lieu de deux ou trois." Au Bouche-à-oreille, Victor Aigouy s’estime chanceux. "Je m’y suis pris en avance, en mai, pour être sûr d’avoir une équipe complète et solide." Un pari réussi pour celui qui affronte sa première saison à la tête du restaurant qu’il a repris en octobre dernier.

"Après, c’est difficile de trouver des gens expérimentés en cuisine, concède-t-il. Heureusement, il y a des bonnes volontés… Mais personne du métier." "Il y a 30 ans, on avait une pile de 200 CV. Aujourd’hui, il y en a zéro, enchérit Nicolas Trichereau, du restaurant de cuisine traditionnelle le Jeu de Paume. Maintenant, les jeunes ne veulent plus travailler ou faire comme ce qu’ils voient à la télé, du Top Chef, pas du bistrot."

Pourtant, ce n’est pas faute de chercher : via des annonces sur Pôle emploi ou sur les réseaux sociaux. "On a eu très très peu de réponses", confie Jean Smith, cogérant des Arcades depuis 5 ans. Pas de catastrophe en vue pour lui : le chef du restaurant est le second cogérant. "Mais on se dit que, à terme, ça va être compliqué de recruter en cuisine."

Développer l’apprentissage

La profession est-elle en train de mourir à petit feu ? "Il faudrait peut-être développer l’apprentissage et lui donner une meilleure réputation, propose Jean Smith, qui a embauché ses deux apprentis comme commis. Certains suivent des formations trop théoriques et lâchent vite en découvrant la réalité du métier." "On a toujours un gros problème sur Millau : c’est la question des logements, avance Yannick Chopin. Pour la saison prochaine, on va mettre en place des hébergements." Pour lui, les salaires ne sont pas un frein. "C’est plus une question d’argent. On a réévalué les salaires. Les collaborateurs sont bien payés."

À moins que la tournure des choses ne soit pas si dramatique et enclenche, au contraire, une nouvelle dynamique. Didier Loubat ne regrette pas de fermer un jour et demi par semaine. "Le lundi soir, ils sont fatigués mais ils font un service à fond, souligne-t-il en observant son équipe. Et le mercredi, ils arrivent tout sourire."

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Les commentaires (1)
Larrynautik Il y a 8 mois Le 11/08/2023 à 12:07

"Maintenant, les jeunes ne veulent plus travailler ou faire comme ce qu'ils voient à la télé, du Top Chef, pas du bistrot."

Mon dieu qu'est-ce qu'il ne faut pas lire. Ce monsieur devrait sortir de sa cuisine et regarder le monde réel un peu. Déjà se former pour être cuisinier, c'est complexe, long et très difficile pour un jeune. Ensuite, c'est accepter des contraintes énormes du métier. Ensuite, trouver un employeur qui rémunère le travail à sa juste valeur, parce que ça sert à rien d'étudier la cuisine pendant des années pour finir au Smic. Mais surtout, le plus important : trouver un patron respectueux et réglo. Ce dernier point, c'est le plus difficile, la plupart des patrons considérant les employés comme un "dû", des sortes de servants devant accepter toutes leurs humeurs sous prétexte qu'ils sont payés. Qu'ils s'achètent plutôt des punching-ball, fassent du yoga, voient des psy et surtout se remettent en question !

Si y'a aucun candidat pour ton resto, c'est plutôt un problème de ton resto qu'un problème externe d'un manque de motivation des jeunes. C'est trop facile de dire ça alors que le chômage chez les jeunes, et la pauvreté, n'a jamais atteint de tels sommets ! Et après on s'étonne que Millau stagne et se dépeuple. Mais les gens vont là où ils ont de l'avenir, là où on les respecte et là où on les paye. Quand ils le peuvent, évidemment, car combien de jeunes n'ont aucun moyen de faire une école de cuisine faute de finances ? Et à combien de ces jeunes Pôle Emploi aura dit : "Non on va pas vous payer votre formation de cuisinier, à la place on vous a inscrit en secrétariat et vous êtes obligé d'y aller sinon on vous coupe les vivres !".

Et trouver un logement à Millau, laissez-moi rire, les agences demandent des CDI temps complet direct, alors qu'on cherche des saisonniers qui seront forcément en CDD. Ces cuisiniers devraient loger en camping-car ? Ou au camping sous une tente peut-être ? "Qu'ils se débrouillent !", diront ces restos. Et bien oui, ils se débrouillent : ils vont ailleurs.