VIDEO. "J'ai l'honneur de demander l'abolition de la peine de mort" : revivez le discours historique de Robert Badinter, en 1981

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Décédé dans la nuit du 8 au 9 février 2024 à 95 ans, Robert Badinter a laissé une trace indélébile dans l'histoire de la politique française, notamment au travers d'un discours en date du 17 septembre 1981.

"Ce 17 septembre 1981 marquera une date" : les mots prononcés par Patrick Poivre d'Arvor il y a plus de 42 ans maintenant résonnent encore plus, ce 9 février 2024, alors que Robert Badinter s'est éteint il y a quelques heures. Au moment où "PPDA" termine sa phrase, celui qui est alors ministre de la Justice vient de boucler un discours synonyme de tournant dans la politique française.

"J'ai l'honneur, au nom du Gouvernement de la République..."

Ministre de la Justice depuis le 23 juin 1981, Robert Badinter grimpe sur le pupitre. Et prononce des mots qui vont entrer dans l'histoire : "J’ai l’honneur, au nom du Gouvernement de la République, de demander à l’Assemblée nationale, l’abolition de la peine de mort en France".

L'hommage à Jean Jaurès

À plusieurs reprises durant sa prise de parole, le Garde des Sceaux évoque Jean Jaurès, le "grand Jaurès - que je salue en votre nom à tous". Il "appartient, au même titre que d'autres hommes politiques, à l'histoire de notre pays. Mais je dois rappeler, puisque, à l'évidence, sa parole n'est pas éteinte en vous, la phrase que prononça Jaurès." Robert Badinter le cite alors : "La peine de mort est contraire à ce que l'humanité depuis deux mille ans a pensé de plus haut et rêvé de plus noble. Elle est contraire à la fois à l'esprit du christianisme et à l'esprit de la Révolution".

Celui qui deviendra plus tard Président du Conseil constitutionnel profite de son allocution pour briser les préjugés qui peuvent sévir sur son chemin. "Il n’a jamais, jamais été établi une corrélation quelconque entre la présence ou l’absence de la peine de mort dans une législation pénale et la courbe de la criminalité sanglante", martèle Robert Badinter.

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"La justice française ne sera plus une justice qui tue"

Dans le sillage d'un discours entré dans l'histoire et aux mots forts en symboliques, le Garde des Sceaux achève son propos en évoquant l'avenir. "Demain, grâce à vous, la justice française ne sera plus une justice qui tue. Demain, grâce à vous, il n'y aura plus, pour notre honte commune, d'exécutions furtives, à l'aube, sous le dais noir, dans les prisons françaises. Demain, les pages sanglantes de notre justice seront tournées." 

Le discours en intégralité est à retrouver sur Amnesty International, qui l'avait retranscrit le 17 septembre 2021, à l'occasion des 40 ans du discours de Robert Badinter.

Loi du 9 octobre 1981

Comme le rappelle le site de l'Assemblée nationale, ce même 18 septembre, par 363 voix contre 117, l'hémicycle adopte, "après deux jours de débats, le projet de loi portant abolition de la peine de mort".

Le 30 septembre, après, cette fois-ci, un passage au Sénat, le texte est voté par 160 voix contre 126. La loi sera promulguée le 9 octobre 1981.

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