Guerre Israël-Hamas : pas de cessez-le-feu, exode de masse à Gaza, couloir humanitaire... Ce qu'il faut retenir, ce lundi

  • Les civils fuient le nord de la bande de Gaza sous les bombardements incessant.
    Les civils fuient le nord de la bande de Gaza sous les bombardements incessant. MAXPPP - MOHAMMED SABER
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Nicolas Drusian avec Reuters

Plus d'un million de civils palestiniens fuient vers le sud de la bande de Gaza alors que les efforts diplomatiques pour obtenir un cessez-le-feu ont échoué.

Les efforts diplomatiques destinés à obtenir un cessez-le-feu pour permettre l'acheminement d'aides humanitaires dans la bande de Gaza, assiégée par l'armée israélienne, ont échoué lundi 16 octobre 2023 alors qu'Israël a ordonné de nouvelles évacuations, cette fois dans une zone frontalière avec le Liban, alimentant les craintes d'un nouveau front dans le conflit qui l'oppose au Hamas.

Israël a promis d'éradiquer le Hamas, qui contrôle l'enclave palestinienne, après l'attaque du 7 octobre dans plusieurs localités israéliennes voisines qui a fait 1 300 morts, principalement des civils, selon le dernier bilan. Des dizaines de personnes ont aussi été enlevées lors de cette journée la plus sanglante dans l'histoire de l'Etat hébreu.

Depuis lors, Israël a lancé un siège de la bande de Gaza, sous blocus total, et ciblée par des frappes aériennes d'une intensité sans précédent. Le service de presse du Hamas a rapporté lundi que 2 808 personnes ont été tuées dans ces frappes et plus de 10 800 autres blessées. Tsahal a aussi amassé des troupes et chars d'assaut à sa clôture frontalière avec la bande de Gaza en vue d'une opération terrestre dans l'enclave pour "éradiquer" le Hamas.

Selon les Nations unies, un million de Gazaouis ont déjà été contraints de fuir leurs logements. L'électricité a été coupée, l'eau potable est extrêmement rare et les dernières réserves de carburant alimentant les générateurs de secours pourraient être épuisées d'ici 24 heures.

"Ne nous testez pas"

Les frappes aériennes menées par Israël dans la nuit de dimanche à lundi ont été les plus importantes depuis le 7 octobre, ont déclaré des habitants. Tsahal a continué de bombarder Gaza au fil de la journée. "Nous nous trouvions à l'intérieur de la maison quand nous avons vu des cadavres dispersés dans les airs, les corps d'enfants qui n'ont rien à voir avec la guerre", a déclaré Abed Rabaya, qui vit à Khan Younes, la principale ville du sud de la bande de Gaza, où la maison de son voisin a été atteinte par une frappe nocturne israélienne.

Nouveau signal laissant craindre un élargissement du conflit, Israël a ordonné lundi l'évacuation de 28 villages se trouvant dans une bande frontalière de deux kilomètres de largeur avec le Liban, alors que le Hezbollah a revendiqué des frappes supplémentaires contre des positions israéliennes. Depuis la guerre de 2006 entre Israël et le Hezbollah, mouvement soutenu - comme le Hamas - par l'Iran, jamais les incidents frontaliers n'avaient été aussi importants.

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a prévenu les Israéliens qu'il fallait se préparer à une longue bataille. S'exprimant devant le Parlement, il a lancé un avertissement à l'Iran et au Hezbollah, faisant référence à la guerre de 2006 qui avait fait un million de déplacés au Liban. "Nous sommes focalisés sur un seul objectif: unir nos forces et aller vers la victoire. Cela requiert de la détermination parce que la victoire prendra du temps", a-t-il dit.

"Et j'ai un message pour l'Iran et le Hezbollah", a-t-il ajouté. "Ne nous testez pas au nord. Ne faites pas à nouveau la même erreur. Parce que le prix que vous devriez payer aujourd'hui sera bien plus important".

La Russie arrive dans les négociations

Les déplacements de responsables occidentaux se multiplient depuis plusieurs jours afin d'éviter un embrasement régional du conflit et de faire avancer l'acheminement d'aides alimentaires. Le secrétaire d'Etat américain, Antony Blinken, était de nouveau attendu en Israël, après des déplacements en Egypte et en Arabie saoudite, notamment. Une visite prochaine du président américain Joe Biden en Israël est discutée par les deux pays, ont dit dimanche des sources.

Au cours d'une visite au Liban, la cheffe de la diplomatie française, Catherine Colonna, a souligné comme la veille, lors d'un déplacement à Tel-Aviv, la nécessité d'obtenir la libération immédiate des otages détenus par le Hamas. "Plusieurs" ressortissants français en feraient partie, alors que 19 ont été tués dans l'attaque du groupe palestinien.

Le président russe Vladimir Poutine a débuté à son tour lundi des discussions avec des responsables au Moyen-Orient. Au cours d'un entretien téléphonique avec Benjamin Netanyahu, il a proposé l'aide de la Russie pour trouver une issue au conflit, a rapporté l'agence de presse officielle Tass. Moscou, qui entretient des relations avec l'Iran, le Hamas, les grandes puissances arabes, ainsi qu'Israël, a déclaré que toute forme de violence contre les civils était inacceptable, déplorant des actions "aveugles" de l'armée israélienne.

Des aides humanitaires à Gaza via l'Egypte

En dépit de ses frappes incessantes depuis neuf jours, Tsahal n'a pas réussi à enrayer la capacité du Hamas à lancer des roquettes vers Israël, où les sirènes d'alerte ont encore retenti. Les efforts diplomatiques se focalisent sur l'acheminement d'aides humanitaires dans la bande de Gaza via le point de passage frontalier de Rafah, en Egypte, la seule route menant à l'enclave qui n'est pas contrôlée par Israël.

L'Union européenne a indiqué lundi dans un communiqué mettre en place un couloir aérien humanitaire via l'Egypte en y acheminant dès cette semaine des fournitures vitales destinées à des associations humanitaires à Gaza. Le Caire a reproché l'absence de coopération d'Israël, déplorant le blocage de centaines de tonnes d'aides.

Devant des journalistes, le ministre égyptien des Affaires étrangères, Sameh Choukry, a souligné "le besoin urgent de soulager la souffrance des civils palestiniens à Gaza". Il a indiqué que Le Caire pourrait permettre des évacuations médicales et laisser passer certains Gazaouis disposant d'une autorisation de voyage. Pour l'heure, l'hypothèse que l'Egypte accueille un grand nombre de réfugiés n'a pas été évoquée publiquement, laissant supposer que la grande majorité des Gazaouis n'auront pas de possibilité de quitter l'enclave.

L'Egypte et d'autres pays arabes considèrent un exode de masse comme inacceptable, disant y voir de facto une expulsion des Palestiniens d'un territoire leur appartenant. Ceux tentant de se rendre au point de passage de Rafah ont décrit un trajet périlleux, sous les attaques. "Alors qu'on faisait route vers le passage, ils ont bombardé la route, on a commencé à crier", a déclaré Hadeel Abou Dahoud, un habitant de Gaza, à proximité du passage frontalier. "Aucun endroit n'est sûr à Gaza. Où que nous allions, il y a des bombardements, des pleurs, des cris, du sang".

Israël a demandé vendredi aux habitants du nord de l'enclave - soit à peu près la moitié des 2,3 millions de Gazaouis - de se déplacer pour leur sécurité vers le sud du territoire.

Discussions sur le point de passager de Rafah

Si des dizaines de milliers de personnes ont écouté cette consigne et fui, les Nations unies ont estimé qu'il était impossible d'éviter une "catastrophe humanitaire" en déplaçant autant de personnes. Le Hamas a demandé aux Gazaouis de ne pas écouter les consignes israéliennes.

Alors que les frappes israéliennes ont détruit des quartiers entiers de Gaza, les habitants s'affairent chaque jour à mains nues dans les décombres pour tenter d'y retrouver des rescapés et d'en ressortir les cadavres. Un représentant des services de secours a déclaré à Reuters qu'environ 1 000 corps étaient coincés sous les décombres de différents bâtiments à travers Gaza. Le directeur du plus grand hôpital de l'enclave palestinienne, Mohammad Abou Saleema, a prévenu que les blessés graves devaient être transportés vers des hôpitaux hors de Gaza, sous peine de manquer de place pour soigner les blessés.

S'il n'est pas officiellement fermé, le point de passage frontalier de Rafah est inopérable, selon l'Egypte, qui cite les frappes israéliennes de l'autre côté de la frontière, à Gaza. Deux sources de sécurité égyptiennes ont déclaré à Reuters qu'une trêve de plusieurs heures avait été conclue pour le sud de la bande de Gaza afin de faciliter les livraisons d'aides et les évacuations via Rafah. Mais la télévision publique égyptienne, citant une source non-identifiée, a nié tout accord. Israël et le Hamas ont tous les deux contesté l'annonce d'une trêve pour ouvrir le point de passage frontalier.

A Rafah, les autorités égyptiennes étaient prêtes pour l'ouverture du point de passage, selon une source. Des centaines de tonnes d'aides fournies par des agences et des pays se trouvent dans des camions stationnés à Al Arish, ville voisine, dans l'attente d'un "feu vert", a dit un représentant du Croissant-Rouge dans le Sinaï, dans le nord de l'Egypte.

Deux résolutions étudiées par l'Onu ce lundi

Le Conseil de sécurité de l'Onu devait se prononcer lundi soir sur deux projets de résolution rivaux concernant Israël et Gaza, portant essentiellement sur la situation humanitaire, avec le risque qu'aucun des textes ne soit adopté. Les Etats-Unis, qui ont droit de veto en tant que membre permanent, protègent traditionnellement leur allié Israël.

Un texte soumis par la Russie appelle à un cessez-le-feu humanitaire, tandis qu'un projet brésilien propose des trêves humanitaires pour permettre l'accès de l'aide et condamne l'attaque du Hamas - ce que ne fait pas le texte russe.

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