Delphine Jubillar, Lina, Emile : comment une disparition est-elle jugée inquiétante et comment travaillent les enquêteurs ?

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Environ 10 000 disparitions par an sont jugées inquiétantes en France. Mais comment décide-t-on de la gravité ou pas d’une disparition ? Comment faire pour signaler une disparition d’un proche ?  Explications.

Delphine Jubillard (elle a disparu à l'âge de 33 ans en 2020), Lina (15 ans, elle est portée disparue depuis le 15 septembre 2023), Emile (2 ans et demi, il a disparu depuis le 8 juillet 2023), ces prénoms reviennent régulièrement à la Une de l'actualité.

Tristement parce que ces trois personnes ont mystérieusement disparu. Ces trois affaires, mais elles ne sont pas des cas isolés, ont été jugées dès le départ comme inquiétantes. 

Près de 10 000 disparitions en France par an jugées inquiétantes

Chaque jour, en France, on enregistre officiellement la disparition de 175 personnes. Et chaque année, ce sont près de 10 000 disparitions qui sont jugées inquiétantes par les autorités, selon les chiffres du ministère de l'Intérieur. 

Mais, à partir de quel moment, peut-on juger qu'une disparition est jugée inquiétante et quel est le protocole mis en place ?

Majeurs protégés et mineurs

Il existe deux types de disparition. Celles volontaires qui, même si elles sont souhaitées, le caractère inquiétant n'est pas systématiquement écarté. Et puis, il y a les disparitions involontaires.

De fait, les disparitions d'enfants et de mineurs sont d'office présumées jugées inquiétantes. Plusieurs critères sont pris en compte : "L’âge de la personne, son état de santé, sa situation, mais par-dessus tout, les circonstances de la disparition", explique le commandant Olivier de Visme, commandant divisionnaire dans la police à nos confrères d'Actu.fr.

Toutefois, dans ce nombre de disparitions, il y a aussi des adolescents qui fuguent volontairement. Dans ces cas-là, la disparition n'est considérée comme inquiétante si elle perdure dans le temps. Ce fut le cas, récemment, de Julie, finalement retrouvée cachée dans un appartement.

Concernant les majeurs protégés, c'est-à-dire les personnes sous tutelle, curatelle ou protection de la justice, c'est à l'appréciation des gendarmes ou des policiers en fonction des informations recueillies. La raison ? Parce qu'une personne majeure est considérée comme libre d'aller et venir comme elle le souhaite, sans obligation d'en informer ses proches.

Les signes

D’autres signes peuvent entrer en ligne de compte et conduire à une disparition inquiétante : si la personne n’a pas emporté ses affaires personnelles (carte bancaire, téléphone portable), si elle a laissé une lettre de suicide, si elle est malade, en dépression, si c’est un majeur protégé, atteinte de la maladie d'Alzheimer, d'une personne souffrant d’un deuil ou d’une séparation difficile… Ou encore d'une personne partie se balade en montagne... Tous ces critères sont pris en compte et analysés. 

Une inscription obligatoire au Fichier des personnes recherchées

Automatiquement, une personne portée disparue est inscrite au Fichier des personnes recherchées (FPR). Celui-ci est alors étendu à tous les pays de l'espace Schengen.

Dans les cas des disparitions inquiétantes, leur signalement est automatiquement diffusé à tous les commissariats et les gendarmeries de France. 

À quel moment, l'enquête démarre ?

C’est le procureur de la République qui juge du caractère inquiétant de la disparition. Comme le détaille Ouest France, il y a deux cadres judiciaires. D'abord, l’enquête judiciaire pour disparition inquiétante d’une personne, qui au bout de huit jours bascule en enquête préliminaire, est réalisée par les forces de l’ordre sous l’autorité du procureur de la République. Géolocalisation de la personne, mouvement bancaire, appel à témoins, auditions, analyse des réseaux sociaux, exploitation des images de la vidéosurveillance, recherches engagées sur le terrain, etc., peuvent alors être déployés.

À tout moment, celle-ci peut basculer en information judiciaire  pour recherche des causes de la disparition en fonction d'éléments circonstanciels. À ce moment-là, c'est un juge d'instruction qui est nommé. Les forces de l’ordre travaillent alors sur commission rogatoire, en son nom. Comme c'est le cas, par exemple, dans l'affaire de la disparition du petit Emile en juillet 2023, de Lina en septembre 2023 ou comme ce fut le cas pour l'affaire Jubillar, dans le Tarn. 

Les réseaux sociaux

Philippe Guichard, de l'Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP) évoquait en 2019 dans une interview au Parisien que "les réseaux sociaux sont désormais systématiquement dans la boucle de diffusion des appels à témoins. Ils sont devenus incontournables". 

Mettant toutefois en garde puisque ces plateformes de diffusion mondiale échappent à tout contrôle. "Les réseaux sociaux peuvent partir dans tous les sens. Ils peuvent inciter les gens à prendre des initiatives maladroites, qui risquent de nuire à l'enquête". 

Le droit à disparaître

Il existe aussi le droit à disparaître dans certains cas pour les personnes majeures. En effet, en France, disparaître de manière volontaire n'est pas considéré comme une infraction pénale. Autrement dit, il arrive que les forces de l'ordre retrouvent des personnes qui ne le souhaitent pas. Dès lors, la personne qui a signalé la disparition est prévenue que la personne est en vie et qu'elle ne souhaite pas être localisée.

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